B59-Du 12 septembre 1944 au 31 décembre 1944
- Détails
- Catégorie : B5- La fin de la guerre
- Publié le lundi 1 avril 2019 19:12
- Écrit par THIEBAUT Alain
- Affichages : 419
Du 12 septembre au 31 décembre 1944
Mardi 12 septembre 1944
Pesmes et sa remise de médaille
Une remise de médaille a lieu ce matin (ou peut-être le 11septembre) sur les Promenades, face à l'Aigle d'Or. A l'issue d'une prise d'armes réussie, une douzaine de maquisards armés et au garde à vous, le lieutenant Vergon un des responsables du maquis de Pesmes remet à Suzanne Magnin une décoration pour son activité d'agent de liaison au service de ce maquis. Image(01) : Remise de la médaille, Image(02) : Prise d'armes à Pesmes
Elle transmet des informations sur la situation à Pesmes concernant surtout l'arrivée de convois allemands, leurs équipements en matière d'armes et de véhicules et leurs nombres… avec son vélo chargé d'un panier recouvert d'un tissu, pour attirer l'attention des Allemands, les messages qu'elle convoie sont cachés dans la pompe ou dans le cadre… Plusieurs fois contrôlée, sa gentillesse et son audace lui ont permis de n'être jamais inquiétée surtout ce 7 septembre 44...
Dans la présentation des maquisards, on peut reconnaître le jeune avec un veston clair (il n'a pas encore 18 ans…) Jean Simonot.
Suzanne Magnin
Le parcours de cette jeune fille pendant la guerre mérite d'être raconté. Née en 1923, elle a de qui tenir : son grand-père maternel, l'ancien commissaire de la Police de Paris Xavier Guichard, celui qui a mis fin aux méfaits de la bande à Bonnot. s'est retiré à Pesmes.
Son père Marcel Magnin décide de sécuriser sa famille à Pesmes surtout qu'il vient d'acheter la Concession exclusive Peugeot de Dole.. Agent de renseignements, il transmet ses informations et ses rapports en Angleterre via le Portugal, il est aussi chargé dès mars 41 de la récupération des drapeaux enterrés en zone interdite ( il en récupérera 3 ainsi que des étendards), des archives d'Armée et de certains documents secrets, sous les ordres du colonel Duvivier. Image(03) : Drapeau et étendards
Passeur d'environ 150 prisonniers, il refuse de se soumettre à la politique collaborationniste de Vichy. Recherché par Vichy et la Gestapo, Marcel Magnin est obligé de fuir la zone interdite tout comme son fils Jean. Mais sa femme et sa secrétaire sont arrêtées par la Gestapo et envoyées dans les camps à l'Est. Marcel et Jean sont condamnés à mort le 23 novembre 1942 par le Tribunal allemand de Dijon.
Parents et frère arrêtés ou en fuite, c'est Suzanne qui doit s'occuper de ses frères jumeaux et de son grand-père, charge de plus en plus difficile à assumer quand, à la préparation du maquis de Pesmes, elle décide de s'engager en tant qu'agent de liaison… Image(04)
Sur cette photo, on reconnaît au premier plan Emile Prudhon chef des Pompiers, les 2 jumeaux Magnin et Georges Bourgeois le maire de Pesmes ; au second plan Suzanne Magnin, Alce sa mère, un couple ? Jean Magnin.
Suzanne est donc décorée de la médaille de la Résistance, puis plus tard de la Croix de guerre à l'ordre de la Division.
Pesmes et son pont
La folie de la veille passée, il faut revenir à la réalité du jour. Tout d'abord son pont égratigné ; un trou d'un mètre de diamètre dans la chaussée au dessus de l'arche central, mais qui ne laissait pas voir l'eau. Il faut y ajouter des fissures du tablier et une partie de la rambarde partie à l'eau. Il suffirait de le colmater pour lui rendre son intégrité.
Dans la matinée un colonel du génie américain vint ausculter le pont : un petit tour de barque sous l'arche endommagé et la décision tombe. Il faut faire sauter cet arche central et la remplacer par une passerelle métallique qu'il maîtrisent bien.
La population de Pesmes est avisée de la mini explosion de son pont, malgré le scepticisme de certains Pesmois maîtres es ponts de pierre : le père Morel charretier de profession arrivé de la scierie Dubus avec des madriers est convaincu qu'ils suffisaient à boucher la brèche…
Les habitants sont éloignés de la zone proche du pont, d'autres regardent depuis les terrasses du château ; le Génie américain est disposé côté Jura. Une petite charge est disposée dans le trou. On vérifie que personne n'est dans les parages. La dernière à franchir ce pont est Mlle Edwige Julien secouriste de la Croix Rouge qui s'en revient à vélo de Montrambert. Le colonel lui donne 10 minutes pour renter chez elle, le pont doit sauter après. Tout se déroule comme prévu, on n'entend bien l'arche tomber à l'eau, un nuage de poussière rend impossible la vue du pont.
Alors que le nuage disparaît insensiblement, 2 à 3 minutes plus tard, des craquements se font entendre, comme des bruits de piliers tombant à l'eau, avant qu'un nouveau nuage de poussière et d'eau refasse son apparition dans un fracas énorme. Le pont tout entier est à l'eau…. De rage, le colonel américain en jeta son casque par terre. La chute du pont provoqua un début d'inondation dans les prairies avoisinantes.Image(05) : Pont de Pesmes Image(06) : Pont partie Jura Image(07) : Pont prairie inondée
La pression exercée sur les 2 piliers de l'arche mise à l'eau, a été trop forte et successivement les autres arches s'affaissèrent. On voit les pierre de piliers s'aligner dans la rivière, si bien qu'on aurait pu traverser l'Ognon à pied, mais 3 m plus bas... Les autorités américaines en ont conclu que la charge d'explosifs était peut-être trop forte.
Dans la devise du Génie il est dit : détruire pour mieux reconstruire, ce sont les hommes du 83è bataillon de Génie de la 3è DIA (Division d'infanterie Algérienne) venue de Provence, qui vont s'atteler à la construction provisoire d'une passerelle en bois, tâche qu'il maîtrise bien, en voici quelques photos . Image (08) : Pesmes Passerelle-1 Image(09) : Pesmes Passerelle-2 Image(10) : Pesmes Passerelle-3
On en fera une étude détaillée car elle est richement fournie en documents gentiment prêtés par Jean Marie Vieille de l'Hôtel de France à Pesmes.
Le pont du tram
Dans la foulée de l'avant-garde américaine du 117è Régiment de Cavalerie US, suivent le gros des troupes alliées qui veulent rejoindre l'Alsace et la frontière allemande. Leurs passages nécessitent le franchissement de rivières, de préférence par des ponts gardés intacts ; ils sont rares. Maintenant hors de question de franchir à Pesmes le pont de pierre, il est à l'eau…
Un maquisard leur suggère de franchir l'Ognon à l'ancienne ligne du Tacot abandonné depuis fin décembre 1933, l'idée leur semble excellente car les 2 piliers sont bons même si la largeur est un peu juste pour le passage des chars. Le pont du Tacot avait été vendu mais en raison de la période troublée et les risques de guerre devenant de plus en plus sérieux, son démantèlement fut interdit.
Alors le Génie américain se met en action de façon remarquable. Le pont du tram non déferré peut être emprunté à condition de le renforcer, il n'y a plus d'accès, et des broussailles et des arbres ont gagné la voie, mais pour eux il n'y a pas de problème .
Les Américains vont se mettre en évidence, les uns pour construire un chemin à travers champ, à hauteur de la maison Poncelin pour rejoindre le pont. Ils amènent caterpillar, bulldozer concasseurs.., font sauter des carrières à Mutigney pour récupérer la pierre nécessaire à la stabilisation du futur chemin, transportée par leurs GMC ; les autres pour la confection de madriers indispensables au tablier du pont. Pour le sciage des bois, ils utilisent des tronçonneuses à air comprimé, l'air provient de camions-citernes ; les madriers sont placés d'abord en long suivant les rails de la voie ferrée, puis transversalement qu'ils clouent entre eux avec des fiches en acier plantés à l'aide de marteaux-piqueurs. Image(11) : Pesmes Caterpillar Téléphone Pont
Le travail s'effectue de jour comme de nuit, Il n'aura pas fallu plus de3 jours pour voir le pont du tram remis en service, les convois de chars ou de camions venant du Sud l'empruntent sans arrêt, même de nuit. Les Pesmois regardent les chars franchir l'Ognon, les jeunes juchés sur la rambarde à l'entrée du pont s'amusent à signaler aux conducteurs des chars, le pouce levé signifiant qu'il a droit de s'avancer sur le pont mais un seul à la fois. Ils reçoivent en échange des chewing-gum ou du chocolat. Quel bonheur...
Puis ils vont les voir prendre le grand virage à droite après la gare, pour remonter dans Pesmes. Le passage ininterrompu des chars a complètement défoncé la route qui ressemble à cet endroit là à une tranchée. Les chars n'ayant pas d'échappement, ce sont des flammes qui sortent derrière, formant un spectacle étonnant, ; il fallait les voir circuler, les chars de Patton… Puis ce sera au tour de la 1ère Armée Française de De Lattre.
En octobre arrive la saison des pluies, l'Ognon déborde et arrive jusqu'à l'ermitage. Les camions qui s'écartent du fameux chemin où les ornières deviennent de plus en plus profondes, sont embourbés. Des câbles de très grande longueur sont alors utilisés pour les tirer depuis un GMC muni d'un treuil, positionné sur une partie stable. On ne parle plus de chemin mais d'un colossal bourbier.
Le pipe-line
Les troupes blindées et les camions de ravitaillement remontent rapidement, mais il leur faut assurer aussi le ravitaillement en carburant, la consommation des chars est considérable. Pour assurer cette demande, les Gis installent au fur et à mesure de leur avancée, le long des routes, des tuyaux réalisant des sortes de pipe-line qui s'allongent indéfiniment. A Pesmes l'explosion du pont de pierre provoque un gigantesque bouchon de chars, GMC, auto-moteurs, camions chargés de matériels de toute nature. La circulation est bloquée du pont jusqu'à Champagney et la Tuilerie, facilement 3 km.
Des navettes sont organisées au niveau du pont du Tram et de celui des Forges bien moins solide.
Ce pont des Forges, des Allemands l'avaient miné avant de quitter les lieux, leur passage près du pont fut aperçu de quelques gens de Mutigney. Un ancien de 14/18 vint le déminer au soir du 9 septembre. Ce pont mi-métallique côté Pesmes et mi-bois pour sa partie Mutigney en très mauvais état fut consolidé par des madriers.
Les camions-citernes chargés de fûts d'essence passent à vide sur le pont des Forges et vont chercher l'essence du côté d'Auxonne, puis repassent l'Ognon les citernes pleines de carburant, par le pont du Tram. Mais la situation ne peut durer longtemps.
Le pipe-line dispose sur son trajet de 3 pompes , à Auxonne, Champagney et Chaumercenne, l'une d'elle est toujours à l'arrêt, 2 tuyauteries conduisent le carburant, une d'environ 10 cm de diamètre, l'autre plus importante. Avec la pression, les tuyaux simplement posés sur le sol se soulevaient. Certains furent soudés grâce à des postes à souder dernier cri, d'autres reliés entre eux par des colliers de serrage. Ce sont ceux-ci qui furent desserrés, laissant échapper le carburant dont à peine la moitié était récupérée par les artisans de la resquille, le carburant perdu à Chaumercenne contamina l'eau de la source de Chaumercenne qui avait un fort goût de carburant. Son auteur (un habitant de Germigney en faisait commerce...) fut retrouvé grâce à la brigade de surveillants du pipe-line dont le poste était précisément au carrefour de Chaumercenne. Sur la 1ère photo proposée, on trouve une équipe de 2 patrouilleurs :sur la moto Jean Besancenot et son copain Guérin commis à la perception de Pesmes, tous 2 gardiens du pipe-line qu'ils devaient surveiller de Pesmes à Chancey, jour et nuit. Ils dormaient chez Madeleine Courboillet, une pièce à l'étage qu'on atteignait grâce à l'escalier externe, aujourd'hui disparu. Image(12) : Pipe line patrouilleurs Image(13) : Gardiens du pipe line à Chaumercenne
Le téléphone
Il fut installé dans les mêmes périodes que le pipe-line, d'ailleurs sous les tentes américaines s'entassent pour les repas, les ouvriers du pipe-line et ceux du téléphone. Une vis-tarière disposée sur l'avant du GMC est actionné par le conducteur, pendant que d'autres soldats du Génie disposent les poteaux directement dans les trous, poteaux déjà équipés de leurs tasses, après avoir passé les câbles. La ligne téléphonique Champagney-Pesmes fut installé en l'espace d'une journée, tout le Génie américain en action.
Cantonnement des troupes
Avant de poursuivre le combat dans les Vosges et en Alsace, les troupes de la 1ère Armée Française remontée de Provence, et celles venues du Sud-Ouest, firent une halte dans la région : pour se reposer et se reformer, mais aussi pour ralentir cette avancée trop rapide avant la frontière.
La Brigade Alsace-Lorraine
L'unité principale qui a stationnée autour de Montagney est la brigade Alsace-Lorraine formée de maquisards du sud-ouest et de forestiers alsaciens et lorrains, constituée autour de leur chef le colonel Roger alias André Malraux. L'étude est faite à part, voir Menu.
A Pesmes
Stationne à Pesmes le 83è bataillon de Génie de la 3è DIA (Division d'Infanterie Algérienne), il a vocation de construire la passerelle provisoire en bois destinée à franchir l'Ognon du Jura à Pesmes, suite à l'explosion du pont de pierre. Ce bataillon a fait la Campagne d'Italie et suit la 1ère Armée Française pour refaire des ponts provisoires, ses hommes ( une cinquantaine) sont logés au château des Capucins et à l'hôtel de France de Mr Vieille, en majorité des Algériens, Mr Mandret percepteur est chargé d'assurer l'apport de moutons pour le traditionnel méchoui ...
Une étude plus détaillée est aussi faite à part : les ponts de Pesmes pendant la guerre 39/45 ; voir Menu
A Valay
Aux portes de l'hiver, c'est une compagnie sanitaire qui cantonne à Valay, beaucoup de camions ambulances, mise en repos à Valay alors que le front est à Lure et Champagney. Des GMC et des véhicules de transports et des infirmières. La compagnie y restera une quinzaine de jours. Ils demeurent sur la Charme où ils ont installé leur roulante ; d'autres sont logés dans les nombreuses maisons ou granges inoccupées. Parmi les éléments de cette compagnie, on trouve des Algériens et des Marocains. Une quinzaine de femmes, des A.F.A.T(Auxiliaire Féminine de l'Armée de Terre) sont reçues dans les bâtiments oùdernièrement logeait Maurice Hug. Cette compagnie appartient au 14è Bataillon Médical de la 5è DB (Division Blindée) commandée par le général de Vernejoul. Comme véhicules, elle dispose de GMC, 3 jeeps, des Command-Cars et au moins 5 ambulances et 2 Half-tracks mais pas de blindés.
L'insigne de celle-ci :--France D'abord-- dans un carré comportant un autre carré délimité par 4 triangles identiques, 2 rouges et 2 bleus.
Le capitaine d'administration Jacquemain en profite pour engager des ex-maquisards rentrés dans leur foyer après la libération de Gray, pour une année supplémentaire. Ainsi seront pris Paul Lombardet et Daniel Boulanger de Valay, Charles Gay de Lieucourt, Jean Duvernoy de Chaumercenne, Jean Simonot de Chevigney recruté à Nancy, et d'autres encore. Ils apprirent à défiler : --1, 2, 3, , demi tour droit…bref des bricoleries-- s'autorise Charles Gay. Les 50 recrutés dans les villages du coin furent intégrés dans une Compagnie Hors Rang.
La compagnie a quitté Valay le 6 novembre 44pour rejoindre les Vosges.
Elimination des épaves et autres, de la guerre
dans la région, de multiples éléments de guerre furent abandonnés le long des routes, surtout allemands. Pour éviter des accidents, ces objets furent récupérer pour être éliminés.
Thervay
Ainsi le 11 septembre 44, alors que tout le village attend le passage de convois américains, les gamins du village, pour passer le temps, cherchent dans les fossés tout ce qui a pu être abandonné ou largué, douilles de mitrailleuses d'avions, grenades, munitions qui ont servi et qui sont censées être inoffensives. Malheureusement le jeune Paris, un réfugié parisien, met la main sur une grenade à manche dans le fossé face à la Tuilerie. Tous les jeunes s'attroupent autour du héros, ce qui alerte les parents, la mère chargée de fleurs et d'un drapeau, ordonne à son fils de s'en débarrasser. De déception, le jeune la jette violemment au sol ; la grenade éclate et le gosse est mort sur le coup. Gilbert Bardouillet ressent alors un choc contre sa poitrine qui l'épouvante et s'enfuit dans les champs avant de s'effondrer. Transporté à l'hôpital de Dole dans la camionnette du fromager Roy de Brans,, un drapeau blanc bien mis en évidence sur le véhicule, l'enfant sera sauvé. Le futur menuisier gardera toute sa vie une ombre de l'éclat qui lui perfora le poumon, visible dans les radios qu'il dut passer…
Et encore Thervay
Une automitrailleuse américaine fut abandonnée près de la Tuilerie par des Allemands , récupérée comme d'autres véhicules US lors d'une contre-offensive allemande à Bourg en Bresse. Cette AM8 fut mitraillé par des P 47, elle a brûlé plus de 5 jours durant ; un jeune du village Pierre Geley put récupérer la mitrailleuse.
Une voiture légère, une Renault fut aussi abandonnée par 2 Allemands qui l'avaient volée, près du pont. --Cette voiture, il faut l'enlever-- conseille le père Petigny d'Ougney à Albert Pélot. --Décroche la vitesse pour la mettre au point mort, tu vas la tirer avec ton Kiki – . Apès avoir accroché la voiture au cheval, Albert se met au volant de la Renault tenant les guides qu'ils passent par le pare-brise abaissé, Abel Petigny au cheval. L'entrée dans Thervay aurait mérité une photo…
Courchapon
Après le 4 septembre et toutes les nuits, des convois de chars et de camions circulent sur la route de Jallerange à Besançon ; ils battent retraite en bon ordre. Un soir, des bruits de marteaux ou autres outils contre des plaques d'acier réveillent la famille Touret. Discrètement les enfants regardent par la fenêtre, un char allemand est en panne arrêté juste en face de leur maison. Des Allemands s'affairent à réparer cette énorme carcasse pendant que d'autres attendent sur la route mais en vain, il est remorqué par un autre blindé jusqu'au carrefour avec la route qui monte de Lantenne à Courchapon. Voyant qu' il ne peut être remis en route, les Allemands l'incendièrent, souvent la panne venait de la boite de vitesse ou de direction du char. Assailli par des amateurs d'objets militaires, il fut beaucoup dépecé ; Au bout de l'affût du canon, une pièce de laiton (ou en cuivre) en fut retiré par des ferrailleurs qui firent sauter le canon avec un explosif. Image(14) : Courchaon Panzer-1 Image(15) : Courchapon Panzer-2
Un second char allemand venant d'Etrabonne fut abandonné au carrefour de Lantenne. Il avait celui-ci des problèmes de direction, preuves les traces qu'il laissa contre le mur d'une maison encore visibles, il y a quelques années à Etrabonne.
Chancey
Sur la route de Chaumercenne avant d'arriver à Chancey, dans le bois à droite une camionnette française est retrouvée, sûrement en panne ; à côté gisent 3 chiens-loups que les Feldgendarms ont tués faute de pouvoir les emmener, tout comme les caisses de munitions qu'ils n'ont pu recharger en remontant dans un véhicule d'une colonne allemande.
Les maquisards sont bien entendu venus rechercher les munitions pour approvisionner les armes récupérées sur leurs prisonniers. Des papiers écrits en allemand étaient éparpillés dans les environs, documents intéressants ?, ils furent abandonnés.
Les engagements de maquisards
Comme on l'a vu précédemment, les capitaines de compagnies cantonnant dans le secteur vont faire de la publicité dans les familles de maquisards rentrés chez eux pour terminer la saison agricole. Certains viennent au pied de la ferme dont les cultivateurs sont en battage… et ça marche. Les jeunes recrues sont engagées pour la durée de la guerre, un an minimum. Voici par exemple le parcous militaire du jeune Charles Gay de Lieucourt. Il a 19 ans quand il rentre au maquis de Pesmes. Après sa dissolution au 12 septembre 44, notre maquisard rejoint ses anciens copains des bois à Gray, aux Casernes pour former un régiment : ce sera le 60è d'Infanterie : un peu d'instruction sur place. Mal habillés et mal organisés, certains comme lui regagnent leurs familles. Fin octobre, il est encore au battage chez Duhaut quand un soir, le Capitaine Jacquemain accompagné de son chauffeur. Il est alors recruté à Valay pour le 14è Bataillon Médical de la 5è DB, comme une cinquantaine d'autres des environs
Son parcours : Gevigney le 11 novembre pour une huitaine de jours, Montbozon puis Montbéliard en 6X6 américains de la 1ère Armée puis Constance : ils n'est pas des combats. Son rôle consiste à conduire les camions du Service Sanitaire ou du Train. Puis Altkirch Charles Gay est versé dans le Sanitaire tout comme Louis Bardy de Sauvigney, Roger Voillot de Valay ou Jean Duvernoy de Chaumercenne. Les 3 compagnies de ce Bataillon sont réparties dans les parages de la 5è DB à une trentaine de km d'elle ; Saint Dié où tout est ravagé, Sainte Marie aux Mines au bas du Haut-Koenigsbourg avec 1,20 m de neige…
Dans sa compagnie, les 3/4 des soldats sont marocains qui souffrent des conditions météorologiques ; Charles est chargé de la comptabilité du ravitaillement : tant d'hommes tant de rations, pas de vins pour les Marocains…
Le 31 mars 1945 c'est le passage du Rhin à Spire sur un pont de bateaux, après le passage des chars.Le fleuve est en crue, très agité. Puis Konstanze où il y restera jusqu'à l'Armistice signé le 8 mai 1945. Charles Gay, comme les autres recrues ne rentrera chez lui qu'après avoir effectué son année de contrat. Il ne retrouvera les siens à Lieucourt que fin décembre 1945.
Engagement dans le 60è RI
De nombreux maquisards du secteur comme Pierre Lombardet, dont des anciens soldats de l'Armée d'Armistice, intègrent à Chamlitte où ils sont rassemblés, le 60è RI commandé entre autres par le capitaine Jarrot et l'adjudant Filet. Ils sont ensuite dirigés à Besançon au Fort des Rousses, puis Strasbourg avant d'atteindre l'Allemagne. Comme engagé, il y est resté jusqu'en 1946 où Pierre a fini à Constance, alors que beaucoup de ses copains étaient déjà rentrés. Il avait en charge l'armurerie. A l'issue de son engagement, Pierre Lombardet voulut poursuivre sa carrière dans l'aviation mais Jarrot le lui déconseilla, ce qu'il fit. Pierre termina sa carrière militaire au grade de caporal-chef.
Engagement d'une femme
Un autre engagement est à mentionner celui d'une jeune fille de Jallerange : Juliette Robardet. Elle a pris cette décision fin décembre 44, une de ses amies était au 9è Bataillon Médical de la 2è DIM (Division d'Infanterie Marocaine)., Depuis Besançon où elle passe son permis, elle rejoint l'hôpital de Belfort en stop...puis Salins où elle y reste 15 jours. Juliette rejoint enfin le Bataillon en Alsace à Soultz, arrêt de 15 jours aussi. Elle est affectée au même Bataillon que son amie.
Le Rhin est franchi à Speere 2 jours après Pacques sur des pont-bateaux, un Rhin fou-furieux faisant d'énormes vagues, puis Karlsruhe. La Division reçoit l'ordre de ralentir car à force de trop s'avancer, l’État Major craint l'encerclement. Juliette Robardet et la 2è DIM continue sur un rythme plus lent jusqu'à Bruxheim et redescend sur l'Autriche, la frontière est passée à Immerstadt où le Bataillon a cantonné longtemps dans une école d'Hitler : c'est au moment de l'Armistice. Alors retour à l'ouest, à Fribourg à la Toussaint. Juliette Robardet ne sera démobilisé qu'en mars 1946.
Le crash d'un P47 à Montagney
Le 6 novembre 44 vers les 8 h 45 du matin, le jeune Gaston Denizot attèle les chevaux dans la cour de la ferme pour partir labourer, en vue de semer las blés. Un groupe de 3 avions en formation, 1-2 reviennent de mission en Alsace ou peut-être en Allemagne : leur mission , faire du straffing contre les convois allemands sur route ou contre les vois ferrées.. Le premier se met à piquer mais il ne semble pas avoir des ratés de moteur. Puis une descente en vrille et un bruit assourdissant.
L'avion accroche la double rangée de peupliers puis une seconde explosion quand l'avion touche le sol. Tout le monde accourt au lieu du crash : à 50 m de la route menant à Sornay, un peu avant le Puits de Jonc. De l'avion planté dans le sol, on ne voit plus la partie avant de l'avion qui disparaît sous 2 m de terre. La cabine s'est enfoncée dans le sol et malheureusement le pilote avec, aucune chance de faire quelque chose pour lui. D'ailleurs impossible de s'approcher de la partie visible de l'avion,les balles des mitrailleuses explosent les unes après les autres. C'est un P 47 Thunderbolt américain.
Les 2 avions du groupe reviennent faire un passage au dessus du lieu du crash, une sorte d'hommage à leur collègue mort prisonnier dans le cockpit de son avion.
La raison du crash, peut-être le pilote touché dans sa mission, car son avion ne posait pas de problème…
Deux jours plus tard, il ne restait plus rien de la partie émergée du P 47, elle fut mise en miettes, chacun voulant en garder une partie, l'un l'hélice, un autre la roue arrière ; Henri Beuraud eut la chance de retrouver une des deux mitrailleuses de l'avion, une 12/7 conservée intacte. L'autre, c'est Gaston Denizot qui la dénicha dans un ancien bosquet de saules et de peupliers que son père avait fait bulldozée par Asdrubal, très endommagée, il faut dire que cette mitrailleuse lourde de près de 30 kg, s'était plantée à plus de 500 m de l'impact de l'avion sur le sol…
Dans l'été 45, un GMC et une jeep sont arrivés sur les lieux du crash, 5 à 6 noirs américains venus récupérer le corps du pilote toujours coincé dans le cockpit. Les jeunes du villages furent écartés et durent restés sur la route. Les restes du pilote furent entassés dans un drap blanc puis déposé dans le GMC.
Ce pilote était un Canadien de 22 ans, il perdit la vie bien loin de chez lui… Son père, lui même un pilote mais de bombardier, figurait parmi les soldats venus pour cette récupération.
Le rapport effectué par la brigade de Pesmes et retrouvé au Service Historique de la Gendarmerie au Fort de Vincennes signale que ce P47 Thunderbolt porte comme immatriculation le numéro 115452 (le premier 1 n'est pas garanti, lecture délicate). L'avion est partagé en 3 parties bien distinctes : la partie avant moteur invisible enterrée, la carcasse au bord d'un trou d'une profondeur de 3 m, et le gouvernail nettement détaché à 10 m du point de chute.
Un service de garde a aussitôt été engagé par le détachement de la Compagnie de la Brigade Alsace-Lorraine stationnée à Sornay et Montagney, avec la consigne de ne laisser personne approcher des débris de l'appareil… Image(16) : P47 à Montagney
Sur l'image, Mme Thevenon et ses 2 fils Pierre et Jean Claude parmi les débris du P 47.
Des témoins oculaires de l'accident mentionne un groupe de 4 avions chasseurs bombardiers, un d'eux ne volait qu'à 3 à 400 m a fait un tonneau lent parfaitement réussi, puis un autre au cours duquel il a eut une perte de vitesse ; le moteur s'est emballé et l'avion a piqué nettement vers le sol laissant apparaître des flammes. Une explosion s'est produite. On suppose qu'il s'agit d'une entrée en vrille car les débris au sol sont déviés de 180° de son vol en l'air. Aucun témoin n'a vu de parachute sortir de l'avion, les occupants sont enfouis dans le terrain marécageux.
Le 11 novembre 1944 à Chaumercenne
Une émouvante cérémonie eut lieu ce jour au village ; la première après tant d'année de privations, toute manifestation publique était strictement interdite par l'Occupant. Elle fut relevée par la présence devant le Monument aux Morts, de la compagnie cantonnée à Chaumercenne de la Brigade Alsace-Lorraine, commandée par le capitaine Antoine Diener alias Capitaine Ancel, un instituteur mosellan.
Après l'office religieux célébré par le nouvel abbé Guy Schlienger arrivé dès le mois de septembre 44, la Marseillaise entonnée par les enfants de l'école communale rassemblés autour de leur instituteur Charles Degand, fut reprise par la population et les soldats de la compagnie. Au premier plan le capitaine Ancel au garde à vous. Image(17) : 11 novembre 44 à Chaumercenne
La matinée s'acheva par une réception à la mairie, où le Conseil Municipal restreint offrit une collation appréciée de tous. Ce 11 novembre 44 resta sûrement le plus émouvant de tous ceux célébrés à Chaumercenne.
Crash d'un P 47 à Saligney
Ce dimanche 15 octobre 44 aurait pu être un dimanche ordinaire s'il n'y avait eu cet accident heureusement matériel : le crash d'un P 47. Vers les 9 h30 du matin, un avion qui vient de quitter la base de Tavaux a des ratés de moteur au-dessus de Saligney, une fumée noire s'en échappe. Le pilote saute en parachute et l'avion tombe 50 m plus loin juste en bordure de la route (côté gauche) menant d'Ougney à Saligney, un terrain vide (aujourd'hui les premières maisons du village). L'avion prend feu bien qu'il se soit enfoncé en terre. Il brûlait encore une 1/2 heure plus tard quand des Américains de la base arrivèrent sur les lieux.
Les hommes du Génie américain se présentent avec d'immenses grues portés sur de gros engins de transport. Ils ressortent de terre une partie de l'avion dont les ailes et la queue, la partie contenant le moteur est restée enfouie. Puis un bulldozer nivela le terrain comme si rien ne s'était passé avant.
Quant au pilote accroché à son parachute, il tomba dans un buisson, il fallut l'intervention du frère de Jules Vincent de Saligney pour l'en extirper. Son parachute replié, il s'offrit une cigarette et en proposa une à son sauveur qui refusa. Conduit à la famille Vincent, le pilote un peu brûlé à la joue qui avait pris une teinte rougeoyante, fut soigné par la maîtresse de maison grâce à l'application d'un tissu imbibé d'un produit adoucissant. Les ex-FFI de Taxenne récupérèrent le pilote de l'avion qu'ils reconduisirent à la base.
Un mois plus tard, ce jeune Vincent gratta le sol nivelé où eut lieu le crash ; il retrouva des balles de mitrailleuses de l'avion, plusieurs centaines qui n'avaient ni brûlé, ni explosé et même des bandes de balles intactes ; il faut dire que l'avion venait à peine de décoller de Tavaux quand le crash eut lieu à Saligney. En séparant la balle de la douille, il récupéra le cuivre, métal très recherché à cette époque encore de restrictions, qu'il put revendre à des ferrailleurs. Il fallait faire feu de tout bois…
Petites histoires d'après Libération
A Montagney
Le dimanche 17 septembre 44 vit fleurir des croix gammées sur les façades des maisons de certains habitants du village, non pour faits de collaboration mais plutôt des règlements de comptes, jalousie et autres raisons personnelles. Une bonne douzaine en tout ; chez Jean Bonvalot, René Beuraud, Emile Delaître, René Droxler, Jacquinot gérant des Docks,...la maison de Pierre Morel a même eu droit à deux croix gammées. Quelle surprise quand les habitants se rendirent à la messe ; sacrées croix, elles ont bien fait jaser la population : qui, pourquoi ?,..Le prêtre n'évoqua pas ce sujet dans son sermon, mais chaque paroissien ne pensait qu'à ça. Elles furent tracées avec de la peinture au minium ; pas facile de les faire disparaître…
St Adrien
Après la libération du 11 septembre 44, les hangars de St Adrien deviennent pour les Américains un dépôt de matériels de guerre endommagés ou de véhicules militaires américains en panne, pour être réparés et renvoyés sur les terrains de combat. Cette présence continuelle d'Américains en ces lieux non cultivés, permit à la flore locale de s'enrichir d'une plante totalement inconnue en France, plante qui ne poussait que sur la côte Est des États Unis : la bermudienne, plante vivace bleu-violet de 20 à 30 cm de haut.
Les armes lourdes canons, chars… réparés étaient alors testés à Brans ; Des Artilleurs essaient lanceurs et munitions sur le petit dôme, près de la route de Dole à Pesmes, tout près du carrefour de Montmirey le Château. Ca tirait dans tous les sens, en principe en direction du Mont de Brans, un obus a même atteint une de ses fontaines et en a massacré le mur du lavoir...
De ces entrepôts de réparations, il en a été ainsi pendant plusieurs années, à la fin ils furent vendus à des ferrailleurs.