09La vie de la communauté de Chaumercenne avant la Révolution
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- Publié le lundi 14 janvier 2019 21:56
- Écrit par THIEBAUT Alain
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Une année ordinaire de la communauté de Chaumercenne
Une année très ordinaire
Devenus français, les habitants de Chaumercenne n'en continuent pas moins leurs vies consacrées au travail de la terre et à l'amélioration de leur conditions. La Communauté dont ils font partie les aide à régler certains problèmes avec leurs seigneurs, on l'a vu avec la constitution d'un terrier en 1737 ou l'abonnement du droit de four en 1716. Elle se montre unie pour résister aux exigences d'un seigneur, aux interventions d'un curé trop présent dans ses activités mais très disponible pour le bien-être de ses habitants.
Le village mène une vie très ordinaire dont on va en préciser son rôle suivant les saisons : élections, contrats communautaires, répartements ( impositions), bans, …
Elections des échevins de l'année
La communauté est gérée par 2 échevins élus à la mi-octobre de l'année précédant leurs activités communales. Voici celles pour l'année 1768
Le 11 octobre 1767 au lieu et sur la place publique de Chaumercenne est faite l'assemblée générale convoquée par les 2 échevins en charge de la communauté, laquelle s'est manifestée par plusieurs coups de cloche à la manière accoutumée, pour procéder à l'élection des échevins, commis et autres gens, à charge pour servir chacun en leur qualité, en l'an 1768.
Pierre François Dornier recteur d'école et secrétaire, est chargé de les conduire comme il est stipulé dans son contrat avec la communauté. Procédés à la pluralité des voix, lesquels suffrages ont été recueillis, lus et publiés à haute et intelligible voix par ledit Dornier. Ces suffrages ont permis d'élire Jean Cabus puis Nicolas Fraumont échevins de la communauté de Chaumercenne pour 1768.
Ont suivi les élections des 2 messiers Antoine Jarrot et Nicolas Rabottier, puis des 2 commis aux répartements : Pierre Guyotte Milan et Henry Guillemin, enfin les gardes des vignes : Antoine Henryet, Hughes Robert, Jean Voilly et Joseph Mourey, en présence de la plus saine et majeure part de la communauté. Les habitants ayant l'usage de la lettre (11 habitants) ont signé et les autres illétérés. Image (1)
La semaine suivante il est procédé à la la nomination des forestiers et gardes des bois communaux : Gabriel Pélicot, Jean Courboillet, Jean François Robert et Sébastien Cabus.
Ce sont donc au moins 14 habitants qui prennent des responsabilités pour leur communauté, signe de vitalité de celle-ci.
Contrats communautaires
La Communauté s'est donc dotée de 2 échevins et de 2 adjoints pour la confection des rôles d'imposition. Ces échevins vont l'administrer et la faire vivre dans les meilleures conditions.
S'il y a lieu de délibérer, ils convoquent les habitants à la manière accoutumée : au son de la cloche et sur la place publique. Délibération est alors prise et les échevins l'appliquent souvent en signant des contrats devant notaire.
Ces contrats concernant différents domaines que les habitants de Chaumercenne jugent essentiels, savoir l'école, le bétail, la forêt, l'église, les impositions, les relations avec les seigneurs du lieu…
L'école
L'échevin signe en principe avec le futur recteur d'école, un contrat de 3 ans. Dans certains cas, le recteur ne satisfait que moyennement le prêtre-curé de la paroisse, ou quelques habitants se plaignent de son comportement dans le village, le contrat est rompu et l'échevin se met en recherche d'une autre personne pouvant faire affaire. Un contrat de recteur d'école à Chaumercenne est aussi en usage à La Résie St Martin puisque cette fonction englobe pour une grande part celle d'assistant du prêtre de la paroisse dans l'exercice de son ministère.
Voici celui de Jean Claude Prévost résidant à Brussey traité par les 2 échevins de l'année Gaspard Guyotte et Jean Dessens, et signé le17 juin 1694 en la grande maison seigneuriale de Chaumercenne, il ne manque que l'agréation de vénérable et discrète personne Mre Jean Collinet prêtre-curé dudit lieu.
Ce marché est fait pour le temps et terme d'un an commençant ce jour. Fait inhabituel pour Chaumercenne...
Il sera tenu de se rendre ponctuel pour faire et répondre audit sieur curé lorsqu'il ira administrer les sacrements dans la paroisse tant dudit Chaumercenne que Résie St Martin, comme aussi de respondre à tous les baptèmes, professions, bénédictions, processions qui se feront pendant le cours de ladite année, de respondre toutes les grandes messes qui se célébreront auxdits lieux, et sera tenu de dire le Salvé Régina, et de faire porter l'eau bénite par toutes les maisons desdits lieux.
Sera tenu ledit Prévost de bien et deheument enseigner les écolliers qui composeront son écolle et ce moyennant 5 sols par mois pour les petits,7 sols pour ceux qui apprenent à lire et écrire, et 10 sols pour ceux qui apprendont le plainchant, et pour rétribution de ce que dessus, les dits échevins ont promis de payer au nom d'icelle communauté, 60 frs ancienne monnoye payable à lui à la fin deladite année pour 2 parts de 3, l'autre part tombant à la charge de la Résie St Martin.
Aura de plus ledit Prévost de tous les habitans et manans composant la Communauté de Chaumercenne, d'iceux une demye mesure de bled bon, léal et marchant, au jour de feste St Martin d''hiver prochain. Image (2)
La Proye communale (le bétail)
Chaque habitant qui cultive terres ou vignes et certains manouvriers ou artisans ont quelques bêtes à élever, poules mais aussi vaches et veaux, cochons et pour les laboureurs un ou plusieurs chevaux
Les terres étant essentiellement consacrées à la culture, les bêtes de la Communauté doivent paître dans des lieux réservés et surveillés pour ne pas traîner dans les rues ou aux alentours des maisons, par exemple dans les champs après les moissons ou dans les bois suivant les dates accordées par l'administration des Forêts. Le pâturage est donc communal et dirigé par un pâtre désigné après délibération, suite à des enchères publiques. Le marché de pâtre n'est valable que l'année présente
Marché de pâtre
Ce 17 avril 1768, Jean Leupard de Chaumercenne et Jean Cabus échevin et ayant charge des habitants de la Communauté dudit lieu ont fait entre eux les conventions suivantes.
Ledit Leupard s'oblige pendant le cours de la présente année, à conduire tous les matins, aux heures convenables, les proies publiques des vaches, moutons, cochons de la communauté de Chaumercenne à la pâture, dans les pâtis et autres endroits du territoire à ce destinés, d'avertir à cet effet par le son de la trompe ou d'autres instruments, pour que chaque habitant luy confie son bétail pour être conduit à la pâture, ramener et reconduire les troupeaux au village exactement tous les soirs pendant le temps qu'il conviendra, qu'ils restent à la pâture la journée entière.
Lorsque les chaleurs se manifestent et que les troupeaux ne pourront subsister à la pâture et qu'ils seront conduits pendant les matinées, il sera alors tenu et obligé de les reconduire à la pâture chaque soir aux heures nécessaires et les ramener au village la nuit tombante, sans y laisser aucune pièce de bétail, et s'il s'en égarait quelques unes il sera obligé d'avertir à tems leurs propriétaires pour se donner les mouvements convenables pour les retrouver.
Il aura attention de veiller soigneusement à ce que le bétail puisse se nourrir et qu'aucune pièce ne tombe malade. S'il s'en aperçoit, il sera tenu de reconduire tout de suite le bétail malade au village et d'en avertir le propriétaire pour qu'il rapporte des remèdes.
Sera tenu de les préserver de la dent du loup et de toutes les bêtes fervus ; s'il arrivait qu'il y ait des bêtes dévorées, il sera tenu de représenter la partie de l'animal qui pourra le mieux faire reconnaître le propriétaire et obligé de luy en paier la valleur ; il empêchera que ses troupeaux en causent aucuns dommages à peine aussi d'en demeurer responsable.
Pour rétribution de quoy il luy sera livré par chaque habitant
-la quantité d'une livre de pain par semaine pour 6 moutons , et payé 3 deniers par chacun et par chaque mois.
-une demie livre de pain par chaque cochon par semaine et 6 deniers par mois.
-une demie livre de pain par semaine et un tiers de mesure moitié froment et moitié orge à celle de Pesmes, bon grain, au jour de feste St Martin, par chaque vache.
Pour les particuliers qui ont leur charrue complète et qui n'attelleront leurs vaches que quelques fois, ils seront tenus paier et livrer audit Leupard rétributions cy dessus promises ; et pour ceux qui n'auront leur charrue complète et qui attelleront leurs vaches, ils seront tenus luy rien paier.
Le contrat est estimé à 35 livres, par devant Félix Barbier notaire royal, lesdits Cabus et Leupard illétérés n'ont pas signé. ((AHS 142E-1) Image (3)
Le prix de garde n'étant pas le même pour chaque catégorie de bêtes, le pâtre doit se montrer un spécialiste de l'argent, il ne sait pas écrire étant illétéré, mais il doit savoir compter…
Les cochons à la glandée
Chaque année, les chênes des bois de la communauté offrent aux propriétaires de cochons du finage une source de revenus appréciables. Encore faut il attendre le bon moment pour envoyer les cochons à la glandée.
En ce 6 octobre 1783, les 2 échevins Jean Henriet et Jean Baptiste Voilly ont convoqué les habitants de Chaumercenne assemblés en corps, à l'effet de délibérer. Après une visite ds bois, ils ont reconnu qu'il y avit une grosse quantité de glands sur les chênes, suffisante pour emboucher, nourrir et engraisser les cochons de chaque particulier.
Les habitants sont rassembles pour la monte au rabais, pour ceux qui voudraient mener, conduire lesdits cochons dans les bois communaux, tous les jours à commencer le 7 du mois courant, pendant le temps de la vive paison.
C'est finalement François Ramey qui a présenté l'offre la plus basse : 10 sols par cochon et par mois.
Il ne manque plus qu'à signer le contrat et prêter serment devant le juge des lieux. En voici la teneur :
Associé par moitié avec Antoine Oudille, ledit Ramey s'engage d'abord à marquer tous les cochons que les habitants voudront leur confier pour ^tre conduit à la glandée, laquelle marque aura pour empreinte la lettre C (pour Chaumercenne), espérons que les cochons du territoire de Chancey ne soient pas marqués de la même lettre… , marque déposée au greffe de la justice des lieux, pour rétribution ils toucheront 2 sols par cochon pour le marquage, sans diminution pour la garde.
Ils seront tenus de les mener et conduire dans les bois communauxlieu-dit de Laffand, des Deffois et de la Bouloye, n'entendant pas qu'ils seront conduits dans le quart en réserve à raison que la coupe est trop jeune.
Ils seront sortis tous les jours à 7 h du matin pour être conduits dans lesdits bois et de tous les ramener au village à 4 h 1/2 du soir, jusqu'au 1er jour de l'an prochain.
Exclusivement seront tenus de répondre en leurs propres noms des amendes qui pourraient leurs être faites en les faisant écarter dans le bois circonvoisins où ils n'auraient aucuns droits, soit de la. dent du loup, à moins qu'ils ne rapportent les échantillons.
Il est fait interdiction aux habitants, à qui que ce soit de ramasser ny enlever les glands dès ce jour dans tous les bois même la quart en réserve.
La rétribution promise de 10 sols leur sera versée par chaque mois et par cochon.
S'il venait à certains propriétaires de retirer leurs cochons pour les engraisser eux-mêmes, ils seraient tenus de payer jusqu'au dit temps, à moins qu'ils ne les tuent ou les vendent.
Les échevins et habitants ont estimé qu'il y avait assez de glands pour nourrir et engraisser 70 cochons, de laquelle quantité il en sera fait un rôle au marc la livre de l'imposition ordinaire sur tous les particuliers du lieu,par lequel il sera dit la quantité de cochons qu'un chacun pourra y avoir, rôle qui sera déposé au greffe de ladite justice. (AHS 142E-1) Image (4)
Le rôle d'imposition permettra à chaque habitant de connaître le nombre de cochons qu'il pourra faire mener à la glandée, ce nombre est déterminer proportionnellement à l'imposition payée sachant que le nombre total de cochons ne doit pas excéder 70, cruel dilemme…
Le bœuf de la proye
.La communauté cherche toujours à satisfaire ses particuliers. Elle a jugé indispensable d'acquérir pour la proye communale un bœuf taureau pour améliorer son cheptel. Une délibération doit être prise pour nourrir et loger le bœuf communal.
Ainsi ce 1er janvier 1787, convoqués par les échevins Daniel Oudille et Estienne Faivre, et après affichages 3 dimanches consécutifs, la monte aux rabais faite après les vespres a désigné Pierre Courboillet pour la somme de 26 livres 15 sols.
Ledit Courboillet s'engage à nourrir et loger ledit bœuf que la Communauté lui fournira, jusqu'au 1er janvier prochain 1788, le mettre tous les jours à la proye des vaches et ne pourra ledit Courboillet le faire servir à d'autres ouvrages.
S'il lui arrivait quelque maladie, le retenant sera tenu d'en avertir promptement les échevins, pur reconnaître ou faire reconnaître la maladie, il sera traité au frais de la communauté.
Ladite somme promise pour rétribution sera payée par les échevins en exercice le 1er janvier prochain sans réquisition. Les habitants ont donné et donnent plein pouvoir aux échevins d'en passer acte devant notaire à la 1ère réquisition d'une des 2 parties.
Contrat de marguillier
L'église tient un grand rôle dans la vie de la communauté, aussi est-il naturel d'aider le prêtre dans le bon fonctionnement de la gestion de son église. C'est le rôle du marguillier, le recteur d'école assistant le prêtre dans la célébration des la messe et dans ses activités religieuses. Souvent le recteur d'école sert aussi de marguillier, comme dans l'exemple suivant.
Ce 1er jour de janvier 1770, les habitants rassemblés sur la place publique de Chaumercenne par les échevins Jean Courboillet et Gaspard Fromont après délibération, ont traité le marché de marguillier avec Pierre François Dornier recteur d'école au dit lieu comme suivant :
Ledit Dornier promet et s'oblige à fournir tous les cierges, huilles nécessaire pour ladite église de Chaumercenne ainsi qu'on a accoutumé de fournir le luminaire de l'église.
S'engage à sonner tout ce qui sera nécessaire et sonnertant pour injures de l'air (orages et tonnerre, incendies,…) que les angelus du matin, midy ou soir, coups de messeset de vespres.
Devra blanchir tous les linges de la sacristie et aussi les raccommoder, pendant le courant de ladite année 1770 pour le prix de 150 livres qui lui seront payés chaque par le moyen du revenu du sel.
Le 14 janvier 1772, la Communauté de Chaumercenne décide une surhausse du prix de l'ordinaire du sel, d'un sol par pain, destiner à payer le luminaire de l'église, au prétexte qu'elle ne dispose d'aucun revenu communal. Image (5)
Contrats de bûcheron
Les bois couvrent 120 arpents (l'arpent équivaut à environ 40 ares), soit 480 ha du territoire de Chaumercenne. Ces bois ne suffisent pas au chauffage du four banal et des habitations de ses habitants Les ne produisent que 6 à 7 moules par arpent (1 moule fait environ 4,3 stères) et l'on en coupe que 7 par année, la communauté ne peut donc redistribuer que 185 stères de bois de chauffage à ses habitants.
Voici le contrat de bûcherons pour l'assiette de 1752 signé le 8 octobre de l'année entre les 2 échevins Jean François Lambert et Jean Claude Bonvalot d'une part et Antoine François Dessans et Claude Boullier bûcherons plus bas ravalants dans la monte au rabais.
Il concerne la quantité de 8 arpents de bois qui peuvent fournir environ 64 moules de bois dont les bûches auront 4 pieds de long (1,30 m) et les moules 4 pieds de toutes faces (2,2 stères environ), et 8 cents de fagots que les preneurs ont estimés à 8 sols le moule et 12 sols le cent de fagots, ce qui formera la somme de 30 livres et 8 sols, sous réserve que lesdits bûcherons coupent bien et duhement ledit bois à la forme de l'ordonnance de l'administration forestière.
10 ans plus tard et toujours en octobre, Pierre Courboillet et Jean Guyotte échevins de la communauté nomment et choisissent Pierre Robert et Jean Claude Bonvalot pour bûcherons à l'effet d'exploiter l'assiette ordinaire qui sera marquée et désignée pour l'usage et chauffage des habitants de Chaumercenne. Les bûcherons s'engagent à faire l'exploitation à la forme de l'ordonnance et d'y employer le nombre d'ouvriers convenable pour que la coupe en soit faite promptement, moyennant le prix et rétribution de 10 sols par moule et 15 sols par 100 fagots ; le contrat est estimé à 80 livres, chaque particulier payera le prix de la façon des moules et fagots qui leurs seront distribués suivant le rôle qui en sera fait par les échevins.
Les deux actes sont passés devant Claude Pyot notaire à à Pesmes.
Autre contrat de bûcherons
Ce 31 janvier 1767, les manants et habitants prennent une délibération pour couper les chesnes de l'assiette de l'année dans les bois de la Bouloye joignant ceux de Valay. 360 pieds sont à couper ensuite de le la permission de l'insigne Conseil de Sa Majesté.
N'ayant pas de deniers de libre ni revenus communaux, il a été décidé unanimement que chaque pied de chesne sera imposé à 15 sols pour être employés au paiement de l'arrêt du Conseil du Roy et aux paiements de messieurs les officiers des Eaux et Forêts de Gray et messieurs les officiers de Pesmes et autres frais faits et à faire.
Les chesnes sont réservés uniquement aux habitants de Chaumercenne sous peines portées aux ordonnances. Pour leur répartition, il est convenu que pour les maisons, seuls ceux propres à bâtir seront répartis ; les mauvais pieds le seront pour les manouvriers qui n'ont point de maison à son propre.
Les particuliers qui procéderont à la juste égalisation, examen et marques des dits pieds ont été nommés de la part de la communauté scavoir :
Pour les riches, Jean Malgérard et Jean Guyotte
Pour les médiocres, Pierre Guyotte Milan et Antoine Dessans
Pour les pauvres, Jean Cabus et Jean Claude Mourey
avec promesse que font les habitants de leur payer à chacun 2 journées employées au service de la communauté pour l'égalisation : à chacun 20 sols par journée.
Une autre délibération est nécessaire pour passer marché avec deux bûcherons pour couper l'assiette des bois, à la forme de l'ordonnace des Eaux et Forêts. Le 27 novembre 1768 , ce marché est attribué à Denis Blanchot et Claude Dessant pour le prix de 10 sols par moule de bois et 9 sols par cent de fagots payés lorsqu'ils auront fini de couper et lier les fagots.
Bien entendu la mauvaise exploitation et les délits reconnus durant ladite exploitation seront et tomberont à la charge desdits bûcherons qui l'ont ainsy accepté.
Marché de l'ordinaire du sel
Imposition ordinaire de la communauté
Le village de Chaumercenne doit d'abord gérer son propre budget, ses recettes en dehors des forêts sont quasi inexistantes, juste la location des carrières et perrières et de quelques terres sans rapport.
Elle doit faire face à l'entretien de son église, des extérieurs du presbytère, de ses fontaines, payer toutes les personnes sous contrat avec elle : le recteur d'école, le pâtre, le marguillier, le porteur de sel, le salaire des commis à l'entretien des routes…, les intérêts de rentes crées depuis si longtemps (73 livres annuellement)…
La liste est longue et pour chaque année les charges et dettes de la communauté s'élèvent à plus de 1800 livres pour des revenus propres de 25 livres…
La vente des assiettes de bois de l'année ne couvrent évidemment pas les dépenses. Alors la communauté se procure le complément en augmentant le prix du pain de sel d'ordinaire, puisque la quantité de sel ordinaire est fixée par l'Intendant.
L'ordinaire du sel
Le sel denrée indispensable pour la nourriture des gens et des animaux mais aussi pour la conservation des aliments ne peut pas être acquis comme du pain ou autres produits. Le Roy en a l'exclusivité de la vente, toute autre manière d'en acquérir est passible d'amendes sévères ...Un rôle des manants et habitants de Chaumercenne pour déterminer la quantité de sel détaxé à livrer à cette communauté dit sel d'ordinaire. Un contrat est signé entre les échevins et un voiturier de Salins ou de Mouchard qui livre mensuellement la quantité autorisée.
Ainsi le 19 mai 1775 sur la place publique en présence du notaire et des habitants réunis en assemblée, les échevins Charles Guyotte et Jean François Lambert ont fait marchef avec le sieur Pierre Boutron voiturier demeurant à Salins, pour voiturer et amener audit lieu de Chaumercenne le sel d'ordinaire que l'on livrera à cette communauté suivant le nouveau règlement du sel pesant 120 livre la charge ; ledit sieur Boutron s'oblige de conduire pendant 6 années et par chaque mois d'icelles, en conformité de la distribution générale dudit sel.
Les habitants s'obligent de payer par chaque pain de sel la somme de 7 sols ; lequel sel sera délivré aux particuliers du lieu, au marc la livre de l'imposition ordinaire de chaque année, par un rôle de distribution que les échevins feront faire aux commis en exercice.
Le sel sera déposé en la résidence des échevins de l'année.
Fait, lu et passé pardevant Estienne Terrey notaire royal à Mottey en présence de de Claude François Viard recteur d'école et de Joseph Gavignet domestique, les deux demeurant à Chaumercenne. Le présent marchef estimé à 140 livres. Image (7)
Remarque
Le document ne précise pas le nombre de pains de sel accordé à Chaumercenne, la charge (unité de mesure du sel) contient 24 pains ou salignons ce qui amène le pain à 2,5 kg.Le marché annuel estimé à 140 livres revient donc à 11 livres 13 sols et 4 deniers par mois, et à 7 sols le pain, la consommation mensuelle de sel pour Chaumercenne est donc d'environ 34 pains, ce qui fait 85 kg pour les 80 feux composant la communauté ; un ménage consomme donc en moyenne légèrement plus d'1 kg de sel par mois, population animale comprise...
10 ans plus tôt, les 2 communautés de Chaumercenne et de Rézie St Martin ont signé un contrat de voiturage du sel d'ordinaire le même jour 25 novembre 1765, avec le même voiturier Anathoile Roussel de Mouchard aux rendages mensuels respectifs de 25 livres 12 sols et 6 livres 13 sols. D'autres communautés ont du aussi s'associer pour signer un contrat plus avantageux avec ledit Roussel, le trajet depuis Salins ou Mouchard ne devant pas se faire en un jour… Bard doit faire voiturer 50 pains pour 20livres, Chevigney 9 pains pour 10 livres, Grande Résie 28 pains pour 11 livres 18 sols et Montseugny se distingue par une bénate (12 pains) et 8 pains pour 10 livres.
En 1770, dans la difficulté qu'ils ont à payer les charges locales citées dans les répartements , surtout celles concernant les gages du recteur d'école, les habitants de Chaumercenne ont promis de payer le pain de sel d'ordinaire15 sols, ce qui représentent pour la communauté une augmentation de revenus de 9 livres par mois.
La communauté préparent les récoltes
Mais la Communauté fait tout ce qu'elle peut pour améliorer la situation de chaque particulier dans les moments les plus importants de l'année, en l'occurrence la récolte des fruits : que ce soit les foins, les moissons ou les vendanges. Pendant ces périodes cruciales, la Communauté organise des gardes des lieux, précise des dates où il est interdit de fouler les terres, pou les hommes comme pour le bétail…
Les moissons
Bien entendu la période des moissons constitue le moment le plus attendu à la campagne. Ainsi pour les moissons, les habitants délibèrent pour définir des jours propres à entrer dans les bois, afin de couper les liens pour les moissons.
Pour cette année 1788, une première assemblée des habitants faite le 6 juillet précise les conditions pour couper les liens indispensables à faire les bottes de gerbes.
Il est permis à tout particulier propriétaire ou fermier ayant champs ensemencés de bled d'automne et de carême, tant sur le territoire dudit lieu que circonvoisins de couper des liens pour l'usage de leurs moissons. C'est pour le jeudi 10 du mois courant ; dans le cas où il ne fasse pas beau temps, eu égard aux pluies continuelles, qu'il fait depuis plusieurs jours et qu'on ne puisse pas les couper ce dit jour, il sera permis de les couper le vendredi 11 et non à d'autres qui n'ont point des dittes espèces de grains ensemencés.
Ils seront coupés dans 4 de leurs assiettes des bois communaux La Bouloye, La Fan et le Deffoy, aucun bois défendu par l'ordonnance ne sera évidemment coupé aux peines y portées, ny permis aucun chariot ny voiture pour les amener au village, aux peines d'amende ; cette coupe se fera à la participation des échevins et garde-forestiers. Passé ce temps, il ne sera plus permis d'en couper aux peines d'amende. Image (8)
Le 11 juillet 1771 les échevins Jean Baptiste Guyotte et Claude Voilly font la visite des bleds suivant les ordonnances du Seigneur Intendant de Besançon ; les bleds seront mûrs pour le jeudy 25 juillet pour les froments.
Aucune bête rouge, chevaux, vaches, moutons et cochons ne doivent parcourir dans les étoules où seront coupés lesdits froments avant mardy 30, sous peine d'amende contre les délinquants.
Il ne sera point mené de moutons dans la pye de froments pour l'aménagement des bestiaux du village qui sont destinés aux harnois.
Cependant si certains particuliers ont besoin de moissonner pour vivre, il leur sera libre d'en apporter sur leur corps et non avec voitures, sous les peines susdites.
Les vendanges
Il en est de même pour les vendanges, le vin produit à Chaumercenne est de très bonne qualité, recherché par des bourgeois de Besançon qui viennent charger dans des tonneaux et cuves, certaines vendanges directement en bout de vignes. La communauté porte donc beaucoup d'attention au déroulement de celles-ci.
Ainsi le 27 septembre 1789 pour la période des vendanges, la communauté a nommé 12 personnes pour surveiller avec les garde-vignes déjà établis, à la conservation de celles-ci, jusqu'à la fin des vendanges. Tout contrevenant s'expose à une amende de 3 livres, moitié au profit de la fabrique de l'église, l'autre part servira aux affaires urgentes de la communauté.
Pour les vendanges 1767, les échevins Henri Oudille et Charles Jacquin fixent les bans scavoir
-1er ban : les vignes de la rue basse et des Cottes jusqu'aux chemins de Montagney et de la Molle pour le s 12 et 13 octobre.
-2ème ban : celles des Plantes, Rebosson et Pommeray pour le mercredi 14 octobre.
-3eme ban : celles des Corviottes, Chevannys pour le jeudi 15 octobre. Image (9)
Pour gagner un peu de terre pour le jardin, il est de coutume à Chaumercenne de planter des haricots dans les vignes ; aussi se pose le problème de leur récolte si elle coincide plus ou moins avec celle des vendanges. Concernant les vendanges 1785 un additif est donc apporté le 20 septembre date de la reconnaissance des vignes :
Il est de plus reconnu que les aricots qui sont dans les vignes ne pourront être en maturité pour être récoltés pour le temps des dites vendanges, et même empêcher les glaneurs de parcourir les vignes au délit de l'ordonnance qui en fait les deffenses ; les échevins ont mis en bans les vignes jusqu'au 12 octobre prochain, sans qu'il soit permis à qui que ce soit de récolter aucuns fruits aricots ou raisins à peine des 3 livres d'amende au profit de la fabrique dudit lieu, avant ledit temps.
Rôles et répartements
Devenu français, le particulier de tout village comtois se voit assailli par toutes les charges liées à la terre, mais aussi par les impositions royales nombreuses, prévues ou non. La communauté de Chaumercenne doit satisfaire aux exigences et édits formulés par l'Intendance de Franche Comté. Elle se trouve contrainte à partager le plus équitablement les sommes réclamées, au marc la livrede son imposition ordinaire, pour le paiement de la capitation, du dixième, du vingtième puis d'un second vingtième, des sols par livre, pour frais de voiture du Roy, pour excédent, pour fourrages du commissaire, pour l'entretien de la milice, pour mendicité à Paris… Les commis au répartement croulent sous les rôles à constituer pour s'acquitter des sommes énoncées dans les mandements de l'Intendant.
Les registres de délibérations de la communauté de Chaumercenne regorgent de pages entières de répartements, mentionnons d'abord :
Ce supplément au 1er vingtième et sol pour livre ainsi qu'aux impositions extraordinaires de la présente année 1772 et ce conformément à l'édit du mois de novembre 1771 qui est de la somme de 304 livres 15 sols, envoyé à la communauté de Chaumercenne pour en faire le payement au marc la livre du 1er vingtième par les commis, sur tous les contribuables de la communauté. En voici quelques aperçus
-Mr le Marquis de Choiseul haut justicier pour droits de seigneurie et 4 ouvrées de vignes : imposé à 1 livre 15 sols 1/2
-Mr le Marquis de Villersvaudey père, pour droits de fourg et folon, justice consistant en 108 mesures de froment, 200 mesures d'avoine, 168 journaux de champs et 228 ouvrées de vignes, imposé à 66 livres 8 sols
- Mr le Marquis de Villersvaudey fils, pour foules et foulon consistant en 8 mesures de froment et 16 mesures d'avoine,7 journaux de champs et 42 ouvrées imposé à 6 livres 12 sols
- Mr le Curé pour 8 o imposé à 1 livre 5 sols 1/2
-Mr Guelle pour maison,jardin verger, 46 j et 84 o imposé à 18 livres 18 sols
-Daniel Courboillet pour maison jardin, 49 j et 59 o imposé à 13 livres 6 sol
- Claude Oudille pour maison jardin, foules et proffit avec 49 j et 53 o imposé 13 livres
-Le sieur Pierrecy pour maison jardin, 32 j et 50 o imposé à 12 livres 4 sols
-Jean Baptiste Guyotte pour maison jardin, foules et proffit imposé à 9 livres
-Héritiers Charles Jacquin pour maison jardin, foules et proffit, 29 j et 40 o imposé à 8 livres 13 sols
Le présent rôle se monte à la somme de 306 livres 3 sols répartis par Jean Baptiste Voilly et Antoine Ligey commis, le 29 mai 1772.
Le notaire Bard certifie que le présent a été lu et publié à l'issue de la messe de la paroisse de Chaumercenne le dimanche 31 may 1772. Image (10)
Quelques remarques peuvent être formulées :
79 contribuables sont cités résidant pour un montant de 273 livres 10 sols et 44 non résidants pour 32 livres 13 sols, avec 68 maisons pour la communauté de Chaumercenne.
5 propriétaires paient plus de 10 livres d'imposition, 28 de 2 à 10 livres, 24 entre 1 et 2 livres et 27 résidants moins d'une livre.
Mr le Marquis de Villersvaudey père paie relativement peu d'impôts au vu des importants biens qu'il possède. Son statut de conseiller au Parlement, puis de conseiller honoraire lui permet de bénéficier d'une réduction des 2/3 de son imposition au titre de la portion colonique, pour ses terres et vignes d'ancien fief qu'il cultive ou fait cultiver par les siens ou par un fermier, privilégié parmi les privilégiés… au détriment des habitants de sa seigneurie qui devront plus se serrer la ceinture pour régler l'imposition de la communauté, exigée par l'Intendant.
L'intendant de Franche Comté avait demandé de répartir la somme de 304 livres 15 sols, les commis ont fait la répartition la plus juste pou un montant de 306 livres 3 sols, faisant un surplus de 1 livre 8 sols, donc une marge d'erreur inférieure à 4,6‰, un travail de très haute qualité. et de précision… , les 28 sols auraient pu être offerts à nos deux commis répartiteurs.
Citons enfin ce répartement de 1765 pour frais de voiture du Roy fait par les 2 commis de l'année Henri Guyotte Mourot et Sébastien Cabus pour une somme de 84 livres 5 sols ; les nobles sont exempts de cette imposition…
Notons d'abord l'erreur de 3 sols 3 deniers sur le montant total d'imposition ce qui fait une marge d'erreurs inférieure à 2‰, encore mieux que précédemment…
Les plus imposés donc les plus riches des habitants de Chaumercenne sont évidemment ceux qui paient la plus grande contribution, Claude Oudille et Daniel Courboillet. 13 particuliers paient moins de 10 sols, et la Communauté en cette année 1765 compte 66 feux dont on peut connaître le nom du chef de famille. Image (11)
Et les années non ordinaires ?
Les années non ordinaires de la Communauté sont souvent celles de la vente de son quart en réserve. Ce quart forestier se vend lorsque les coupes réservées ont entre 25 et 30 ans d'âge. Tous les 25 ans, la Communauté s'engage dans des frais considérables, le revenu de la vente excède les 10 000 livres.L'autorisation de couper son quart en réserve est demandée à Mr l'Intendant de Franche Comté après avis favorable de la Maîtrise des Eaux et Forêts. Elle est attendue par toute la population qui espère de grands travaux indispensables à leur communauté, surtout dans ses bâtiments communaux.
Année 1728
Cette année là, même si les documents manquent, on doit penser que les revenus de la vente du quart en réserve, l'ont été en grande partie pour les réparations faites à la fontaine de Fourney.
En effet la Communauté demande la réfection de la voûte de la fontaine, la construction d'un tarin (?) pour évacuer les eaux et celle d'un bassin de 6 pieds par 8 pavé et des murailles de 1pied 1/2 hors terre (2m X 2.60m X 0.50m), réparations importantes qui ont du sérieusement engager les finances de la Communauté.
On peut aussi affirmer que la fontaine de Fourney est antérieure à 1700 et que les habitants ont toujours voulu la restaurer dans l'unique but : celui de fournir de l'eau consommable pour le particulier de Chaumercenne et son bétail, même son éloignement du village ne l'a pas découragé...
Année 1753
Le 9 janvier 1750, la communauté de Chaumercenne par la voix de ses échevins Jean Guyotte Milan et Pierre Robert prennent une délibération pour la vente de leur quart en réserve âgé de plus de 25ans. Pour les habitants, deux réalisations sont importantes voire essentielles, la construction de la maison curiale et d'une fontaine au lieu-dit la Martine.
La maison curiale
Le presbytère se trouve entièrement ruiné et impraticable, lequel il convient à le construire à neuf ainsi que les dépendances et aisances. C'est ainsi que commence le projet de la future maison curiale présentée le 18 avril 1751 par Claude François Devosges. Rien n'a vraiment changé avec l'habitation actuellement possédée par Béatrice Thevenon. Le porche avec l'inscription 1753 au dessus de la porte d'entrée puis la cour, délimitée à gauche par le four à pain et la cuverie et à droite par l'écurie et la grange puis le bûcher, et au fond en surélévation l'habitation du sieur curé construite sur la cave sur toute la largeur de la maison. A gauche contre l'habitation sont prévues les latrines, l'aire à pourceaux et la basse-cour.
Derrière la maison, par une terrasse on accède au jardin, 4 plates-bandes rectangles arrondis aux aux extrémités délimitant 2 allées perpendiculaires avec au centre une disque circulaire, le tout entouré d'arbres fruitiers. Image (12) Image(13) et Image (14)
Claude François Devoge signe les plans tracés à l'échelle, par terre, en coupe, et en élévation pour tous les bâtiments, l'unité étant le pied de roy.
L'acte est enregistré en la Maîtrise de Gray, paraphé par De Fleury, Grand Maître des Eaux et Forêts, signé avec l'entrepreneur Jean Guyotte Milan et le procureur du Roy à Gray, Martin.
Coût de la construction : 6874 livres10 sols, sur laquelle il convient de déduire le 1/3 que la Communauté de Rézie St Martin est tenue de payer à la décharge de la Communauté de Chaumercenne, à qui restera les 2/3 , scavoir 4584 livres 3 sols et 4 deniers.
Au 14 juillet 1754 le sieur curé Moussard prêtre-curé de Chaumercenne est logé confortablement, pendant tout le temps de la construction en la grande et belle maison d'un confrère Messire Claude Malgérard prêtre curé de St Hippolyte les Durnes (dans le Doubs), au loyer annuel de 27 livres dont 1/3 est à la charge de la Communauté de Rézie.
En mai 1755, la maison curiale doit être terminée puisqu'au début de ce mois, sont nommés les procureurs généraux de la communauté Pierre Robert comme caution et Jean François Lambert pour certificateur dans la seconde construction promise aux habitants, la fontaine de la Martine.
La fontaine de la Martine
On reprend les mêmes et on recommence. Revoici Jean Guyotte Milan qui obtient le 25 avril 1755 l'adjudication de la construction de la fontaine, de ces messieurs les officiers de la Maîtrise de Gray. Les plans, Claude François Devoge les a établis en même temps que ceux de la maison curiale.
La fontaine sera constituée d'un réservoir pour ramasser les eaux lesquelles seront conduites au village par des corps de fonte, ainsi que les bassins et jets.
Le réservoir de 15 pieds de long sur 12 pieds de large enfoncé ou fouillé dans la terre de 4 pieds, autour il sera bâti des murs pour renfermer l'eau, de 2 pieds 1/2 d'épaisseur et 8 pieds de haut pour y bâtir une voûte faite en berceau, avec une porte au devant.
Il sera posé des tuyaux de fonte dans la longueur de 150 toises, formant 300 gros tuyaux ou corps de3 pieds de long et 3 poulces d'ouverture et 150 petits de même longueur mais de 2 poulces à chaque bout. Lesdits tuyaux seront fouillés comme il soit pour la pente des eaux qui par ce moyen seront conduites au village.
Il sera fait une niche ornée d'une cuve d'architecture de 6 pieds 1/2 de long sur 3 pieds de haut et 4 en largeur d'où sortira l'eau, dans le milieu de laquelle il sera fait un masquaron de pierre en sculpture, lequel jettera l'eau par la bouche ; de chaque côté 2 pilastres couronnés d'une antique avec une cartouche en sculpture. Derrière la niche, il sera fait un cabinet avec une porte, couvert d'une seule table de pierre et renfermant un corps de plomb pour remonter les eaux dans le masque.
Un bassin au devant de 25 pieds de long sur 18 de large en pierre d'œuvre, enfermé d'un parapet en pierre de taille de 4 pieds de haut de manière que du cotey de la rue il ne restera que 2 pieds de hauteur hors de terre.. le fond du basin sera tablé de cadettes ainsi que le pourtour des parapets.
Image (15) et Image (16)
L'estimation des ouvrages se monte à la somme de 4124 livres dont 27474 livres pour les seuls corps de fonte avec écroux et anisses.
La reconnaissance des travaux n'eut lieu que le 7 décembre 1758. Les espoirs mis dans cette fontaine pour qu'enfin la communauté puisse avoir l'eau au village, n'auront été que de courte durée.
En décembre 1769 les tailleurs de pierre qui tirent et taillent de la pierre sur le territoire de Chaumercenneau lieu-dit es Martine devront être tenus de bien et descemment vuider la fontaine avec défense de mettre et embarrasser le communal, de mettre et oter les baraques qu'ils ont construites et s'exécuter pour le mois de mars, sous peine de dépens, dommages envers la communauté, et d'amendes suivant les ordonnances du roy. L'usage respectueux de cette fontaine n'est plus la première préoccupation des particuliers, elle sera totalement délaissée plus tard.
Année 1780
Le 9 juin 1780, les officiers de la Maîtrise des Eaux et Forêts de Gray accordent l'adjudication de la vente de son quart en réserve, au sieur Belligond pour la somme de 10995 livres.
Quelques mois plus tôt, anticipant cette vente, la Communauté de Chaumercenne par ses échevins Antoine Malgérard et Claude Oudille, avait trouvé une finalité aux sommes à percevoir : priorité avait été donnée aux réparations à faire à l'église paroissiale, et le reste aux autres bâtiments, fontaines tout particulièrement.
Le 31 mars 1780 remet à la Communauté les plans et devis et détail estimatif pour l'exécution des ouvrages compris dans les présentes, l'architecte n'est autre que le sieur Anathoile Amoudru de Dole, à qui l'on doit les plans des églises d'Autoreille, Frasne le Château, Sauvigney les Pesmes et Chancey, mais aussi le mobilier religieux.
Les réparations à l'église concernent la couverture du toit au-dessus de la chapelle des habitants dont on ne peut pas s'en dispenser de la refaire à neuf, et partiellement celle au-dessus de la chapelle du seigneur, là où il sera nécessaire. Le bénitier détruit par les gelées sera enlevé dans sa totalité et refait en pierre du pays polie et lustrée. Le chœur, les chapelles et le dessous du clocher seront blanchis en beau gypse blanc et la partie basse en gris foncé, le vitrail du chœur refait à neuf comme la pierre d'autel, un nouveau tabernacle sera installée dans une nouvelle niche artistiquement sculptée. L'entrepreneur fournira deux tableaux à installer de part et d'autre du maître-autel, l'un représentera St Isidore et l'autre St Vincent, ils devront être peints sur une bonne toile par un maître habile et mesurer 5 pieds de long sur 3 de large. Ces tableaux n'ont pas été,et remplacés par 2 autres représentant la Sainte Famille, tableaux que la commune a fait restaurer depuis peu.
Une nouvelle table de communion plus avancée dans le chœur pour élargir le sanctuaire, en fer forgé avec porte à deux battants sera installée avec marche en pierre faite à neuf pour la supporter. Le pavé en dalles de pierre de la sacristie sera enlevé et remplacé par un plancher en planches de chêne.
L'entrepreneur y fera un buffet constitué d'un bas avec 5 grands tiroirs pour serrer les chapes et autres ornements, et d'un dessus divisé en 4parties chacune fermant à clef pour y renfermer calices et autres vases du service divin, le tout en belle menuiserie de chêne. Il sera fait une chape en damas blanc avec bandes de bordures en damas rouge, à l'ancienne et dans le même goût. L'entrepreneur fournira aussi 2 chasubles en damas, à fleurs et fond blanc, les échevins seront présents lors de l'achat, un devis de 450 livres est proposé. Une porte en fer avec deux vantaux en bois sera faite entre le dessous du clocher et la nef.
Mais le gros des travaux est constitué par la réfection du clocher et sa couverture et la fondue d'une cloche dans le village pour remplacer l'ancienne, elle sera du poids de 1500 livres. Le métal de cette cloche sera composé de 3 parties de cuivre jeté sur une partie d'étain, jeté au fourneau après que le cuivre sera fondu et aura été épuré de ses crasses. L'addition pour le clocher et sa cloche est salée : 5160 livres sur les 9500 du devis total incluant des réparations aux fontaines et à la maison commune. Image (17)
La bénédiction de la cloche a lieu le jeudi 23 novembre 1780 et la repose au clocher le 4 décembre, la rendue des travaux avec tous les gens concernés s'est faite le 4 juillet 1781.
Rôles et répartements de la Communauté
Devenu français, le particulier de tout village se voit assailli par les toutes les charges liées à la terre, mais aussi par les impositions royales nombreuses, prévues ou non. La communauté de Chaumercenne doit satisfaire aux exigences et édits formulés par l'Intendance de Franche Comté. Elle se trouve contrainte à partager le plus équitablement les sommes réclamées, au marc la livrede son imposition ordinaire, pour le paiement de la capitation, du dixième, du vingtième puis d'un second vingtième, des sols par livre, pour frais de voiture du Roy, pour excédent, pour fourrages du commissaire, pour l'entretien de la milice, pour mendicité à Paris… Les commis au répartement croule sous les rôles à constituer pour s'acquitter des sommes énoncées dans les mandements de l'Intendant.
Les registres de délibérations de la communauté de Chaumercenne regorgent de pages entières de répartements, mentionnons seulement ce supplément au 1er vingtième et sol pour livre ainsi qu'aux impositions extraordinaires de la présente année 1772 et ce conformément à l'édit du mois de novembre 1771 qui est de la somme de 304 livres 15 sols, envoyé à la communauté de Chaumercenne pour en faire le payement au marc la livre du 1er vingtième par les commis, sur tous les contribuables de la communauté. En voici quelques aperçus
-Mr le Marquis de Choiseul haut justicier pour droits de seigneurie et 4 ouvrées de vignes : imposé à 1 livre 15 sols 1/2
-Mr le Marquis de Villersvaudey père, pour droits de fourg et folon, justice consistant en 108 mesures de froment, 200 mesures d'avoine, 168 journaux de champs et 228 ouvrées de vignes, imposé à 66 livres 8 sols
- Mr le Marquis de Villersvaudey fils, pour foules et foulon consistant en 8 mesures de froment et 16 mesures d'avoine,7 journaux de champs et 42 ouvrées imposé à 6 livres 12 sols
- Mr le Curé pour 8 o imposé à 1 livre 5 sols 1/2
-Mr Guelle pour maison,jardin verger, 46 j et 84 o imposé à 18 livres 18 sols
-Daniel Courboillet pour maison jardin, 49 j et 59 o imposé à 13 livres 6 sol
- Claude Oudille pour maison jardin, foules et proffit avec 49 j et 53 o imposé 13 livres
-Le sieur Pierrecy pour maison jardin, 32 j et 50 o imposé à 12 livres 4 sols
-Jean Baptiste Guyotte pour maison jardin, foules et proffit imposé à 9 livres
-Héritiers Charles Jacquin pour maison jardin, foules et proffit, 29 j et 40 o imposé à 8 livres 13 sols
Le présent se monte à la somme de 306 livres 3 sols répartis par Jean Baptiste Voilly et Antoine Ligey commis, le 29 mai 1772.
Le notaire Bard certifie que le présent a été lu et publié à l'issue de la messe de la paroisse de Chaumercenne le dimanche 31 may 1772 Image (18)
Quelques remarques peuvent être formulées :
79 contribuables sont cités résidant pour un montant de 273 livres 10 sols et 44 non résidants pour 32 livres 13 sols, avec 68 maisons pour la communauté de Chaumercenne.
5 propriétaires paient plus de 10 livres d'imposition, 28 de 2 à 10 livres, 24 entre 1 et 2 livres et 27 résidants moins d'une livre.
Mr le Marquis de Villersvaudey père paie relativement peu d'impôts au vu des importants biens qu'il possède. Son statut de conseiller au Parlement, puis de conseiller honoraire lui permet de bénéficier d'une réduction des 2/3 de son imposition au titre de la portion colonique, pour ses terres et vignes d'ancien fief qu'il cultive ou fait cultiver par les siens ou par un fermier, privilégié parmi les privilégiés… au détriment des habitants de sa seigneurie qui devront plus se serrer la ceinture pour régler l'imposition de la communauté, exigée par l'Intendant.
L'intendant de Franche Comté avait demandé de répartir la somme de 304 livres 15 sols, les commis ont fait la répartition la plus juste pou un montant de 306 livres 3 sols, faisant un surplus de 1 livre 8 sols, donc une marge d'erreur inférieure à 4,6‰, un travail de très haute qualité. et de précision… , les 28 sols auraient pu être offerts à nos deux commis répartiteurs.
Il y a aussi 2 années particulières pour la communauté de Chaumercenne, toutes en lien avec leur seigneur, Benoit Richard le Conseiller au Parlement de Besançon : l'abonnement du droit de four en 1716, et la confection d'un nouveau terrier en 1737.
Abonnement du droit de four du 17 ma1 1716
Situation antérieure :
Les habitants et manants tenant feu audit Chaumercenne étaient assujettis au droit de four que se partageaient les seigneurs tenant la seigneurie de la Baume, sauf 2 particuliers cités par le souverain arrêt de l'an 1644.
Chacun est tenu d'aller et porter cuire ses pains et pastes au fourg banal desdits seigneurs sous peisne de 60 sols estévenants d'amande (3 journées de travail d'un manouvrier), à chaque manquement audit droit, moyennant vingt miches ou gateaux l'un(le seigneur sur toute cuisson à son four banal s'en réservait 1/20è).
Les habitants contestaient non pas le droit de four mais son application qu'ils jugeaient vexatoire voire humiliante et sujette à querelles. Ils s'en remirent à leur seigneur principal qui accepta un nouveau contrat avec la municipalité, signé le 17 mai 1716 par devant Claude Jeannier, notaire royal en la résidance de Pesmes.
Teneur du contrat d'abonnement du droit de four
Ce jour 17 may 1716, Benoit Richard seigneur de Villersvaudey, Chaumercenne pour 10 parts et 2/3 d'une de 12 parts, les 12 faisant le tout) de la moyenne et basse seigneurie dudit Chaumercenne, ayant procuration de Messire Charles Antoine de la Baume marquis de St Martin pou 1/36è, et de Messieurs et dame de Malan pour l'autre douzième d'une part,
Les habitants de Chaumercenne regroupant plus des 3/4 et presque le tout (il manque seulement 5 particuliers), assemblés en corps de Communauté,à la manière accoutumée, par Claude Antoine Guyotte et Piere Guillemin leurs échevins, d'autre part, lesquels pour eux et leurs hoirs successeurs et ayant cause…..ont convenu
D'abord le seigneur relache auxdits habitants et résidant dans le lieu la place du foug banal et le fourg en l'état qu'il sera au jour de la fête St Michel Archange de l'an présent, pour en faire ce qu'ils voudront, même l'alliéner ou le vendre ; s'ils y mettent résider leur maître d'école ou le pastre, ils seront exempts du droit de payer la cense du foulon et celle de l'abonnement du droit de fourg qui suit.
Les habitants et manants se sont obligés, chacun en ce qui le concerne, de payer par chaque feu 2 mesures de bled, bonne graine léale et marchande, bien vannée et netoyée et hors de cuche (?), le 2 mesures à celle de Pesmes, à chaque feste St Michel Archange dont le premier paiement se fera à même date de 1717, auxdits seigneurs ou à ses fermiers et ce après le tintement de la cloche qui sera fait pour l'advertissement, à la grande maison seigneuriale de Chaumercenne .
Le lendemain de la St Michel, le seigneur enverra chercher les 2 mesures de bled chez les particuliers qui devront alors les apporter en la grande maison seigneuriale.
Seront exemps les sieurs curés de Chaumercenne, les recteurs d'école et les pastres du lieu, de mesme que les maisons seigneuriales dudit seigneur et les 2 particuliers déjà cités dans l'arrest.
Pour les particuliers qui ne sèment rien, il sera permis auxdits seigneur de prendre du vin et de la vendange à proportion des 2 mesures de bled. Les non résidants paieront au prorata du temps qu'ils y demeureront. Image (19)
Le présent traité estimé à 10 livres.
Remarque; 5 particuliers ont fait de la résistance à la signature dudit traité, qu'ils finirent par ratifier,11 mois plus tard… , 22 particuliers savaient signer.
Confection du terrier de 1737
Après les malheurs des guerres du 17è siècle, le territoire a subi d'énormes changements voire un bouleversement, des terres et vignes étaient devenues des friches… Les nombreuses remises en état de celles-ci 30 à 40 ans plus tard ont modifié les contours des propriétés des particuliers, d'autant plus qu'elles étaient petites : moins d'1/2 ouvrée pour les vignes et moins d'un 1/6 de de journal pour les terres. Devant la difficulté de cultiver réellement les terres qui leurs appartiennent, certains empiétaient sur celles des autres. Pour y remédier et recouvrir toutes les censes attachées à ces parcelles, Benoit Richard le seigneur principal de Chaumercenne décida la remise à plat du finage de Chaumercenne. Les habitants non plus n'étaient pas perdant, ces nouvelles limites apportées à leurs propriétés permettaient de définir une meilleure et plus juste répartition des impôts royaux.
Choix de l'arpenteur ;
A cette occasion les habitants du lieu ont nommé et choisi le 1er mai 1737, la personne de Charles Gauthier géomètre et arpenteur résidant à Villersvaudey. Ce choix paraît curieux car sa résidence n'est autre que celle dont Benoit Richard dispose en totale justice et seigneurie. Ce dernier a-t-il influencé les échevins de l'année pour faire nommer son propre arpenteur ?…
Déclarations ;
Chaque propriétaire possédant biens, fonds et héritages au lieu de Chaumercenne, en vignes, terres labourables, chènevières doit en faire dénombrement pour connaître plus parfaitement ses biens. Sur place, assisté des propriétaires riverains, le géomètre et arpenteur dessinent les pièces de terres, les pièces de terres ou vignes sont mesurées , à la mesure de l'ordonnance ancienne du Comté de Bourgogne contenant 360 perches carrées au journal, la perche mesurant 9 pieds et 1/2.
Chaque propriétaire se voit ainsi attribué le plan de toutes ses parcelles dessinées sous la forme d'un quadrilatère, très peu souvent rectangulaire… Chaque ligne tracée par le géomètre comporte sa mesure en perches et pouces, sa superficie en perches (carrées) et ses confins : levant, couchant, septentrion et midy.
50 propriétaires se partagent le territoire de Chaumercenne composé de 521 journaux de terres (173ha 2/3) et 824 ouvrées de vignes (103 ha), les bois couvrent 239 arpents ou ha. Le finage du lieu est donc estimé à cette époque à environ 515 hectares (actuellement 495 ha).
Le seigneur de Villersvaudey dispose de 184 journaux de terres et 248 ouvrées de vignes, le sieur curé de Chaumercenne 38 j et 44.5 o, les veuves et héritiers Malgérard de 30.5 j et 27 o. Simon Guyotte 27 j et 41 o. Image (20)
Les 5 plus aisés du village emportent 62 % des terres et 54 % des vignes du territoire.