B54-Les actions du maquis de Pesmes

Actions du maquis de Pesmes jusqu'au 8 septembre 44

 

Nuit du 30 au 31 juillet 1944- Récupération des armes du maquis de Saligney

Le maquis Panthère de Saligney, installé dans le bois des belles Charmes, vient de subir l'assaut des  600 hommes, allemands et barbares de l'armée Vlassov, laissant à terre 22 maquisards exécutés, froidement et inutilement massacrés par ces sauvages, ces bêtes de sang. Ayant pris connaissance de l'invasion du camp qui a été pillé ou détruit, François Guillemot  chef du maquis de Pesmes décide deux jours plus tard, d'opérer seul une reconnaissance sur les lieux mêmes du massacre ; il découvre, à proximité du camp, une petite grotte où les maquisards ont caché une partie de leur armement ainsi que des munitions.

Sa découverte lui semble un trésor pour son maquis qui n'a toujours pas reçu d'armes de ces sacrés parachutages anglais, promis et jamais livrés.

Il faut vite les récupérer avant qu'elles ne soient trouvées par d'autres. Décision est prise par Guillemot et deux de ses adjoints de monter cette opération, la date retenue : le début de soirée du dimanche 30 juillet, il faut trouver une douzaine d'hommes costauds pour ramener armes et munitions.

A 6 h du soir, six jeunes quittent en vélo Pesmes pour rejoindre la maison de François Guillemot à Bard : Maurice Duvernoy et Jean son frère, Louis et René Bardy Pierre Votey et Roger Lafaille. D'autres de Bard sont déjà là : Lucien Ruffy, Georges Déliot, Marius Peseux, Roger Worms et le chef du groupe de Pesmes François Guillemot.

A l'heure convenue, treize solides gaillards se retrouvent planqués dans les buissons bordant la prairie de Brésilley. Chacun est muni d'un grand sac en toile très résistant.

 Pour la protection du groupe un pistolet automatique et une mitraillette Sten, les seules armes du maquis (les autres armes sont personnelles). Autant dire que la récupération des armes à Saligney est indispensable pour le bon fonctionnement du maquis de Pesmes.

 La nuit tombée, l'Ognon est franchi en barque puis le groupe progresse en direction du sud entre le village de Thervay et le hameau de Balançon. Le clair de lune est magnifique , mais la marche silencieuse des hommes est interrompue par les hurlements prolongés des chiens ; côté discrétion il n'y a pas pire….

Dès l'arrivée devant la grotte, deux hommes armés sont postés pour faire le guet pendant que le chargement des armes et munitions s'opère dans les sacs. Cette récupération s'effectue sans problème ; l'inventaire s'établit ainsi : deux fusils-mitrailleur Brenn ( leurs crosses sont accidentées), un bazooka avec projectiles, deux fusils anglais, beaucoup de grenades, des munitions pour fusils et  mitraillettes (9mm). Chacun en aura un plein sac à transporter d'environ trente kilos. Mais ce conditionnement de fortune dont il faut bien se contenter ne convient guère une fois sur les épaules, avec les culasses, les boites de chargeurs, les bipieds et autres aspérités bosselant la toile.

Le retour s'opéra comme à l'aller, avec bien sûr le concert des chiens qui reprend de plus belle à la traversée des deux villages. Le seul incident est la perte de deux grenades par Roger Worms qu'il retrouve le lendemain à la lumière du jour.

Une bonne rasade de goutte offerte par Georges Thevenard remonte le moral des troupes passablement fatiguées, le dos meurtri par le barda supporté par ces jeunes maquisards. Le butin est dissimulé dans un fossé à sec de la prairie de Brésilley avant que le lendemain soir, l'équipe de Bard ne le transfère dans une voiture attelée à un cheval conduite par Lucien Ruffy, vers une cache plus sûre dans le village.

Le retour au bercail s'effectuera au matin du lundi vers les 3h. Les hommes sont exténués, certains gars de Sauvigney s'endorment au travail dans les champs, au grand courroux de leurs parents les accusant d'avoir trop fait la java la veille…

 

Le maquis de Pesmes s'enrichira le mois suivant d'un armement plus conséquent et plus adapté, en recueillant une partie d'un parachutage d'armes effectué dans la nuit du 24 au 25août  sur le terrain de Lavoncourt. Trois tonnes d'armes et de munitions environ réparties dans  une dizaine de containers seront transportées sur un camion  à gazogène de l'entreprise Boudot, cachés sous des rondins de bois. Ont participé à cette opération pleine d'imprévus qui s'est néanmoins bien terminée : Charles Melou chauffeur du gazo, Albert Gauche, Pierre Zimmermann sur le camion, Marcel Rabasse en éclaireur sur une pétrolette, les quatre sous le commandement de François Guillemot.

Ce maquis de Pesmes recevra enfin sonparachutage anglais, dans la nuit du 31 août au 1er septembre 44, sur le terrain Cuve de Sauvigney.

 

fin août 44 : arrestation d'un Russe Blanc

François Guillemot est envoyé  en mission par son chef André Lamboley pour mettre fin aux agissements d'un  Russe Blanc soupçonné d'être un  un agent double.

Cet agent se trouve en pension dans un café de la rue basse à Pesmes. Il suffit simplement de le cueillir grâce à l'intervention d'un partisan espagnol Pierre qui pourrait l'attirer dans un guet-apens.

Armé de sa mitraillette qu'il a démontée en plusieurs morceaux pour qu'elle ne se voit pas, même si le canon dépasse légèrement de la veste, François quitte en vélo Sauvigney pour rejoindre Pesmes mais tombe sur une colonne d'une soixantaine de russes blancs à pied qui battent en retraite.

 Il n'est pas question de faire demi-tour sous peine de se voir aligné par les Allemands qui les encadrent. Il descend de vélo en grognant, simule une crevaison malheureuse mais n'oublie pas de dégonfler le pneu pour ne pas se faire voler son vélo. Le tenant par l'oreille, il croise les soldats qui ne lui prêtent aucune attention, regrettant alors d'avoir dégonflé. Il arrive sur le chemin de la Tuilerie et peut arrêter l'agent double sans difficulté, Pierre l'Espagnol a bient rempli sa mission. Lui ayant confisqué son pistolet, il le ramène à Bard et le confie à la surveillance de sa bande d'amis sûrs : Georges Déliot, Lucien Ruffy, Marius Peseux et son chauffeur Raymond Vorms.

Pour passer le temps ce dernier démonte le pistolet du Russe blanc mais se trouve dans l'incapacité de le remonter. Seule solution, enlever les menottes du prisonnier pour qu'il s'en charge...les balles bien sûr retirées du chargeur.Le Russe Blanc sera gardé quelques jours à Bard puis livré au maquis russe de Mme Alice opérant du côté de Gy. Ce furent Vorms et Zimmermann qui furent chargés du transfert du russe blanc.

François Guillemot aurait préféré le liquider : vivant il constituait un danger puisqu'il connaissait les les maquisards de Bard.

Libéré à la fin de la guerre, il gagnera la Suisse, on n'entendra plus parler de cet agent.

 

 

Le parachutage sur Cuve : nuit du 31 août au 1er septembre 1944.

Le maquis de Pesmes n'est pas encore officiellement installé dans le Gros Bois à Sauvigney. Il attend son parachutage avec impatience pour permettre d'équiper ses effectifs. C'est son chef François Guillemot qui a fait cette demande urgente ; un terrain sur Cuve a  déjà été homologué en août mais toujours pas de parachutage.

Le 30 août un message-- Le cordonnier ferme à minuit--, message répété deux fois (deux avions participent au parachutage) et entendu par un responsable, met en alerte une douzaine de FFI qui se rendent sur les lieux: à l'entrée du bois, à droite de la route conduisant de Sauvigney à La Résie St Martin.Tout est en place, les avions passent au-dessus du terrain balisé, mais aucun largage.

Le lendemain le message passe de nouveau sur les ondes. Les hommes occupent à nouveau le terrain dès les 10h du soir; Maurice Hurtard l'instituteur de Pesmes en assure le commandement, Maurice Duvernoy au FM fait le guet en haut de la côte, Louis Thomas et Louis Bardy ont sorti voitures et chevaux pour le transport des containers. Dans la nuit, les passages de convois allemands de camions, voitures à chevaux et autres ne rassurent pas les résistants pour leur première sortie.Vers les minuit, le bruit d'un avion se fait entendre dans le calme revenu de la nuit, éclairée seulement par les feux de balisage de la piste de largage.

La lettre U , lettre de reconnaissance transmis depuis la piste à l'avion permet au bimoteur qui survole la piste à basse altitude de larguer son contenu, 28 containers. Cet avion parait immense, le spectacle offert aux maquisards semble grandiose, les containers  touchent le sol ; aussitôt les hommes se hâtent de les ramasser et les chargent sur les chariots après avoir roulé les parachutes. Tout le matériel largué semble bien chargé. Les feux sont déjà éteints lorsqu' un second avion survole le lieu, le deuxième comme dans le message ? Tout le monde quitte alors la zone, chacun a bien mérité d'aller se coucher.

Dans la traversée de Sauvigney, Maurice Duvernoy sort un parachute du chariot qu'il pose dans la grange de ses parents mais sa mère, affolée à la vue du colis, va le jeter dans le cimetière. Il sera finalement récupéré par un autre de la famille. Que de beaux corsages seront confectionnés avec ce beau parachute blanc.

A deux heures du matin tous les membres de cette équipée nocturne auront regagné leurs foyers. Auront-ils rapidement trouvé le sommeil ?

Le lendemain un habitant de Sauvigney remarque plusieurs parachutes accrochés à un gros chêne. C'est le jeune Marcel Melou dit Mimile et un autre jeune qui se chargent de les descendre. Dans ces containers, de l'habillement : chaussettes, chemises… leur légèreté était-elle la cause de cet incident ?

Maurice Hurtard le lendemain fait l'inventaire du parachutage destiné à son maquis mais partagé aussi avec celui de Virey commandé par le capitaine Jarrot et à celui de Montseugny par Ducret. En voici la liste : 18 fusils avec baionnettes, 22mitraillettes Sten, 300 chargeurs de FM, 274 de mitraillettes, 63788 cartouches de FM, 44066 de mitraillettes, 468 grenades avec détonateur, 251 explosifs bâton et 10paquets, 29 explosifs en tube, 15 mises à feu dont 10 électriques, 10 rouleaux de chatterton, 13 boites B977, 271 pansements, 37 paires de chaussures, 75 paires de chaussettes, 1 chemise, 4 tricots, 3 blousons, 5 bidons d'essence,un bidon d'huile, et un nécessaire d'entretien d'armes.

Dans cet inventaire deux remarques surprenantes : le rapport entre le nombre de mitraillettes (22) et celui des munitions (44.066), puis le nombre de cartouches de FM (63.788) alors qu'il n'y a pas de FM….Un autre parachutage devait-il compléter ce manque d'armes au vu des munitions  déjà livrées ou était-ce l'autre avion qui devait larguer les armes manquantes ?

 

Un second parachutage a lieu sur le terrain  Cuve, répondant au message – le cordonnier ferme à minuit –, dans la nuit du 15 au 16 septembre c'est à dire quatre jours après la libération du secteur. Sceptiques les hommes s'y rendent. Le parachutage a bien lieu,Vyonnet le meunier de Malans est venu avec son Latil pour transporter les 12 containers  et 7 paquets du largage. L'inventaire  mentionne 3 lance-roquettes Piat, 1 bazooka, 5 FM Bren, 105 mitraillettes Sten, 25 fusils,1.500kg d'explosifs, 29.400 cartouches de FM et 23.000 de Sten. On peut cependant se poser la question : pourquoi ce parachutage en ce lieu, si loin des zones de conflits, puisque les troupes américaines sont dans les Vosges...

 

Deux autres parachutages auraient eu lieu sur Vadans (près de la gare) répondant au message --le tuyau de plomb est crevé--. Le premier raté, l'avion serait reparti sans avoir largué son chargement. Quant au second, il aurait fait jaser beaucoup de personnes du secteur : un parachutage très discret, en majorité de l'argent pour le paiement des frais de différents maquis. Qu'est-il devenu ? Certains se seraient-ils servi ?. Dans son prêche dominical, le curé du Tremblois exhorta ce mal tombé du ciel !...Aurait-il fait la fortune de certains ?

 

Début septembre 1944 le blessé allemand de Grande Résie
Une  affaire qui peut s'avérer dangereuse se déroule dans une famille de La Grande Résie. Un officier allemand blessé sur la route entre La Grande Résie et Champvans (peut-être lors d'une action du maquis de Montseugny) s'est réfugié dans la maison d'Amélie Lafuge seule avec son commis Lucien Viennot, son mari étant  prisonnier en Allemagne. Il exige qu'on le soigne, ce que la brave dame fait, malgré le pistolet qu'il agite sans cesse sous ses yeux, le nourrit et il dort entre de bons draps. Cette situation ne peur durer, mais comment que faire ?

Mme Lafuge part informer le Maire du village, Charles Dagonnaux de la présence chez elle de l'Allemand blessé mais hélas armé, qui en avertit avertit le maquis tout proche. La réponse positive d'un chef du maquis rassure la brave dame mais une condition est exigée pour la réussite de l'opération : --L'officier doit être amené à l'hôpital de Gray par le village d'Aubigney, prétextez que la grande route de Gray n'est pas sûre, avec tous ces Terroristes --….

Un commando de trois hommes est chargé de cette affaire, sous les ordres de l'adjudant Armand Gerbet du Tremblois assisté de Jean Simonot (le plus jeune homme du maquis) et de son pote De Sainte Marie d'Agneaux.                                                  Image(01) : La citation

L'information concernant le jour choisi pour le transfert à Gray est transmise au camp. Au matin, un fils Borsotti  attèle le cheval à un chariot, une botte de paille pour s'asseoir dessus pendant le trajet. Mais l'Allemand ne veut pas d'homme à côté de lui sur le chariot. Geneviève Dagonnaux, la fille aînée de la famille Dagonnaux, va donc accompagner l'officier allemand qui demeure toujours menaçant avec son pistolet.

 L'ensemble prend emprunte la rue du château puis la route d'Aubigney, vite dépassé par une traction noire venant précisément de La Grande Résie, qui ne fait aucun cas de l'attelage, pourtant elle transporte nos trois maquisards. Ces derniers cachent la voiture dans une sommière du bois, il n'y a plus qu'à attendre l'attelage qui se présente peu après. Une rafale de mitraillette surprend l'officier qui n'a pas le temps de réagir ; les autres maquisards s'étant jeté sur lui. Désarmé l'officier se laisse conduire au maquis où le Dr Gaunel lui administre les premiers soins pendant que Geneviève ramène la carriole et le cheval à son propriétaire, puis regagne la maison où la famille dans l'inquiétude l'accueille avec joie et fierté.

 

Dimanche 3 septembre 44 :

Une première altercation route de Chaumercenne

 Un groupe de 6 hommes quittent l'étang Rabasse au Gros Bois sous la direction de N. Charvet un habitant de Motey-Besuche, Pierre Lombardet y participe. Disposés le long d'une route, bien cachés dans un profond fossé qui les rend invisibles depuis celle-ci, ils attaquent la fin d'un convoi de camions et de véhicules légers allemands. Action un peu trop présomptueuse de leur part, ils sont en difficulté lors de l'accrochage ; l'arrivée providentielle d'une patrouille de 4 avions alliés, sûrement des P47 américains, leur sauve la mise. Un premier mitraillage de cette colonne leur permet de décrocher et de regagner le camp. Cette action dont ils ont mal apprécié les dangers leur servira de leçon pour leurs futurs engagements contre l'occupant.

 

 Soutien apporté au maquis de Perrigny

En début de soirée, Pierre Constantin un Pesmois affecté au camp de Perrigny ur l'Ognon demande  le renfort du maquis de Pesmes, pour soutenir son maquis en fâcheuse position  sur la place de Perrigny, un gros engagement a lieu entre le maquis local et un détachement allemand, qui avait décidé de quitter les lieux avec ses 130 prisonniers russes ; on déplore des morts chaque côté, 6 habitants du village sont pris en otages sur le lieu même des combats pour faire écran aux soldats allemands cachés derrière les arbres. Une quinzaine d'hommes quittent donc leur camp vers les 11 h du soir pour porter assistance à leurs confrères voisins, parmi lesquels Maurice Duvernoy, André Brégigeon, René Thiébaut, Jean Simonot, sous les ordres du lieutenant Vergon, sans se faire trop d'illusions. Ils arrivent sur la place où ont eu lieu les combats, elle est déserte, les maquisards de Pesmes assurent néanmoins une présence au cas où les Allemands réinvestiraient les lieux pour venger leurs morts. Les échanges de tirs ont cessé depuis belle lurette. 5 jeunes maquisards sont morts dans le terrible engagement, côté allemand le chef allemand du détachement a été abattu dès les premiers affrontements. Le commandant allemand de la section venue en renfort d'Auxonne, un vieux moustachu qui a fait ses études à Auxonne précisément, dans un français impeccable français impeccable, s'est adressé aux 6 otages :-- civils, rentrez chez vous, vous n'êtes pour rien--. Il n'a pas besoin de faire cesser les combats, les maquisards de Perrigny ayant fui dès l'arrivée du renfort allemand.   Une image de la place de Perrigny où les Allemands se cachèrent derrière les arbres lors de l'affrontement avec les maquisards                    image(02) : Place des Affrontements à Perrigny

Les maquisards de Pesmes quittent Perrigny à 7 heures et demie du matin,traversant les champs de Broye alors que les gens du village arrachent leurs pommes de terre, laissant chez ces derniers un sentiment de crainte et d'appréhension…

Heureusement pour eux de n'être pas restés plus longtemps à Perrigny, A 9 heures les Allemands réinvestissaient le village à la recherche de Terroristes qui auraient pu demeurer sur place pour analyser la situation au lendemain des affrontements.

N'aurait-il pas été plus simple de laisser partir le détachement allemand avec ses prisonniers russes et les surprendre à l'extérieur du village...

 

 

Lundi 4 Septembre 44

 

Mission à Loulans les Forges 

Tôt le matin le Berliet gazo des Ponts et Chaussées d' André Lamboley quitte le camp. Louis Bonnaventure son chauffeur doit conduire son patron à Loulans les Forges pour une mission très spéciale. Louis dépose son patron dans un bois du château, celui-ci revient un peu plus tard avec un sac de bois pour gazogène ; Louis se doute  bien que le sac ne contient pas du bois ...

Comme dans toutes ses missions particulières, il cache le sac dans la réserve à bois du  gazogène de la camionnette. Mais impossible de la redémarrer. Par manque d'huile moteur, Louis l'a remplacée par de l'huile de ricin qui a la mauvaise qualité de coller., Une violente bagarre vient de se dérouler au château, un des frères Hollinger maquisards du secteur a été tué par les Allemands, près du château et l'autre a réussi à s'enfuir abandonnant le véhicule. Louis en profite pour s'emparer de l'automobile,  une 402 déjà empruntée à un ingénieur de Vesoul, un Lamboley lui aussi. On n'oublie pas de charger le sac sur la galerie de la voiture.

Le retour s'effectue avec un passager supplémentaire, l'abbé Jules Jeannin  aumônier du maquis de Talmay qui assure les liaisons entre ce maquis et ceux de Haute Saône. Le départ est si mouvementé que ses occupants n'ont pas remarqué la présence d'un paquet de ceinturons (destinés à recevoir des cartouches de fusils )…Le véhicule arrive dans la nuit à Chaumercenne par la route de Bard, mais reste bloqué au stop par le passage d'une colonne allemande qui descend de Pesmes. La sentinelle  allemande postée en face devant la maison, éblouie par les puissants phares anti-brouillard de la 402, ne  réagit pas quand elle coupe le convoi pour rejoindre la route de Pesmes. Mais au carrefour, la 402 doit s'arrêter devant une autre sentinelle allemande qui jette un œil à l'intérieur. La présence de l'abbé dans le véhicule doit la rassurer. Un grand geste de la main permet au véhicule de poursuivre jusqu'à Chevigney, terme de la ballade. L'équipe arrive enfin, il est minuit passé.

Tout le monde couche à la ferme de Georges Thevenard. Image(03) ,à  gauche son épouse Berthe.

Au matin le sac est encore sur la galerie de la 402, il contient 500 000francs en billets bleus de 500 francs, argent destiné aux maquis de la région et provenant d'un parachutage dans le secteur de Loulans les Forges….

 

Arraisonnement à Chaumercenne

10 heures et demie du soir, à la sortie de Pesmes, un guetteur aperçoit une charrette agricole attelée à un cheval qui se dirige vers Chaumercenne ; à bord  quatre soldats allemands, fusils à portée de mains.

Cette information rapidement transmise au maquis de Pesmes nécessite l'envoi sur place de quatre FFI , le responsable de l'interception  : François  Guillemot  assisté de Raymond Worms son  chauffeur, de Bard les Pesmes ; Armand Gerbet du Tremblois et Marcel Bartholmot complètent le groupe. Dans la Traction, on a chargé la mitraillette Sten de Guillemot, un FM et deux fusils.

La Citroen quitte rapidement le camp, traverse La Résie St Martin mais la voiture à cheval a déjà franchi le carrefour avec la route de Pesmes. La Traction la double tous feux éteints avant le virage, Vorms dépose ses trois occupants à la hauteur du hangar agricole puis s'en va cacher son véhicule dans une cour plus bas.

Le passage de la charrette ne se fait pas attendre, Guillemot s'avance , lâche une rafale de sa mitraillette et crie -- Haut les Mains --. Les Allemands comprennent-ils le français ?, peu importe la carriole s'arrête et sans opposer la moindre résistance, les Allemands se rendent. Ils sautent de leur charrette et mains derrière la tête,  s'avancent vers les maquisards. Sans difficulté, ils déposent leurs fusils sur le sol et pour l'un d'un d'entre eux sa sacoche.

Cette sacoche renferme un trésor… en plus de son ravitaillement, Guillemot trouve du café vert en vrac, environ un kg. Un produit rare en ces périodes de restrictions et de rationnement, sûrement volé dans une épicerie où sévit le marché noir ...

Guillemot se réserve la sacoche, Mme son épouse lui fera sûrement un excellent café à son retour à la maison...Les quatre prisonniers sont chargés dans la Traction, puis conduits au camp du Gros Bois, Guillemot les tient en joue avec sa Sten. Quant à Gerbet et Bartholmot, ils feront le même trajet retour, moins rapidement qu'à l'aller puisqu'ils sont chargés de ramener charrette et cheval au maquis, avec une compagnie plus rassurante, les armes confisquées aux Allemands cachées sous le plateau du chariot.

 

Attaque aérienne aux Quatre Fesses.

Une petite colonne allemande composée en majeure partie de blindés légers arrive en vue du restaurant Les Quatre Fesses sur la route Besançon-Dijon, au carrefour avec l'autre nationale Dole-Gray. Elle essaye d'éviter les grandes routes trop favorables aux mitraillages de l'aviation alliée. C'est à ce moment précis qu' une escadre de trois avions se présente dans l'axe du convoi. Les Allemands sortent des véhicules et se ruent vers le restaurant avant que les Spitfire ne piquent et mitraillent les chars. Cette entrée furieuse et incontrôlée des Allemands affolent les femmes du restaurant. Elles préfèrent sortir par l'arrière pour se cacher dans le champ de mais proche de la cabine téléphonique. Les balles des mitrailleuses arrosent  partout sans discernement, elles tuent la propriétaire Blanche Chevanne et blesse sérieusement la fille. Quant aux Allemands ils attendent le départ définitif des Spitfire pour reprendre la route, celle qui conduit à Pesmes.

Ont-ils eu des blessés ou des morts lors de cette fuite vers le restaurant, on ne le sait pas, en revanche les volailles de toutes sortes et les lapins enfermés dans des cages embarquées sur les chars n'ont pas du résister longtemps aux mitraillages alliés, ces pilleurs de fermes les ont-ils consommés?

 

Mardi 5 septembre 44, très chargé en événements sur la route de Chaumercenne

Au maquis de Pesmes, différents corps francs se sont formés : des groupes de 6 à 8 maquisards, totalement indépendants qui se manifestent en début de nuit pour harceler les troupes allemandes qui circulent sur les routes de Pesmes à Vesoul ou de Pesmes à Gray, puis rentrent au camp. Ce sont donc les zones de Sauvigney et Chaumercenne qui sont la cible de ces Corps Francs, peu éloignés du camp qu'ils peuvent regagner en traversant les bois.

A hauteur du chemin de Résie à 1,3 km de Chaumercenne existait autrefois une surélévation de la route, et de part et d'autres des buissons, lieu propice à des attaques brèves des maquisards de Pesmes. Ce jour pas moins de 3 interventions vont avoir lieu.

 

 Attaques de jour : Chaumercenne

 --Tôt ce matin, un corps franc est en place : 7 maquisards armés de fusils, grenades, appuyés par un FM. Le groupe repère un passage de cyclistes, ils sont 7 Allemands, le fusil en bandoulière qui pédalent sur la départementale. Le chef, un certain Chervet de Motey sort son revolver et tire sur eux, à 50 m de la cible, c'est un peu loin déclenchant la fusillades qui s'avère excessive : les soldats tombent dans le fossé, puis plus rien. Des maquisards se lèvent et vont au devant des cyclistes qu'ils pensent morts, leurs fusils à répétition se mettent à crépiter, quelques uns se planquent derrière les cerisiers et tirent, l'homme au FM pour sauver ses compagnons livrés debout aux tirs allemands dont Pierre Lombardet jeune et inconscient, leur hurlent de se coucher et déclenche le mitraillage. Peu après les échanges de tirs cessent et l'on voit les Allemands bras levés, le fusil à l'horizontal au-dessus de leurs têtes, déposer leurs armes sur la bord de la route. Trois soldats ont été tués, les 4 autres cèdent leurs armes et sont faits prisonniers et emmenés au camp ; inutile de récupérer les vélos criblés de balles, ils sont jetés en lisière du bois ainsi que les 3 morts allemands qui ne seront enterrés que le lendemain (peut-être par des gens de Résie). Le chef fera une remarque à ses apprentis soldats : si vous ne voulez pas vous faire descendre, ne rester pas debout pour tirer…

 

--La deuxième attaque va soulever aussi quelques problèmes et les maquisards vont avoir une chance incroyable. Les instructions du maquis imposant les attaques de nuit ne sont toujours pas respectées.

Il est 2 h de l'après-midi quand 2 Corps Francs se postent de part et d'autre de la route de Pesmes à Chaumercenne, celui au sud côté Pesmes voit les convois ennemis arriver , l'autre au nord côté Chaumercenne non, puisque masqué par la côte ; aux commandes de ces 2 groupes, Georges Thevenard et Roger Lafaille, Peu après leur installation, un convoi de camions bâchés encadrés par des voitures légères, quelques motos et side-cars arrivent sans trop s'inquiéter du danger qui les menace. Des soldats allemands assis sur les ailes des camions se recoiffent tranquillement.Pour la plupart, les résistants ne disposent que de grenades. Ayant dégoupillé leurs engins au début du passage du convoi, ils attendent l'ordre de les lancer. Le convoi est impressionnant et les grenades sont tenues serrées dans les mains, de plus en plus serrées que l'ordre ne vient pas...et les mains souffrent . La délivrance arrive, ils en balance une dans le convoi, puis deux , trois pour certains.

les Allemands hurlent, ça gueule de partout, les motos partent au fossé, le convoi poursuit sa route, faisant des morts et des blessés. L'attaque de l'arrière du convoi par des grenades, suivie de rafales de FM désoriente l'adversaire qui réplique vigoureusement mais trop tardivement. Le groupe massé côté sud voit alors arriver une colonne allemande, plus importante et surtout mieux armée, composée en majorité d'automitrailleuses. Ne voulant pas lutter contre des éléments bien trop supérieurs à eux, ce groupe décide de se replier sur Malans par le bois tout proche, laissant seul les six ou sept maquisard de l'autre groupe….

Ces hommes se font très discrets, ne répondant plus aux arrosages très nourris des mitrailleuses allemandes qui passent au-dessus de leurs têtes et déchiquettent les buissons derrière eux. S'ils avaient dans le bosquet derrière, aucun n'en serait sorti vivant. Les Allemands pourtant supérieurs en nombre et en armes ne cherchent pas à les anéantir, ils reprennent leur route afin de rejoindre le convoi de camions qui les précédaient et qu'ils avaient en leur protection.

 

Et les civils ?

Une personne civile de Chaumercenne a mal choisi son jour pour aller en vélo chercher des médicaments pour une bête malade. C'est Marcel Vagnaux, il arrive dans la descente de Chaumercenne quand les premiers échangent de tirs se produisent ; il saute dans le fossé, un soldat allemand le voit, l'arrête et le présente au commandant de la colonne d'automitrailleuses, évidemment :-- Terroriste,Terroriste--, hurlent les soldats au commandant qui réussit à les calmer, les dénégations de Marcel ne leurs suffisent pas. Il est attaché en fin du convoi et suit le convoi qui s'arrête dans Chaumercenne. Des discussions ont lieu avec le secrétaire de mairie Marcel Cotinaud qui réussit à s'entretenir avec l'officier allemand :-- aucun homme du village n'est en âge de porter des armes, et la personne que vous avez arrêtée n'est qu'un modeste agriculteur qui se rendait à Pesmes chez le vétérinaire-- . Devant la bonne impression laissée par Mr Cotinaud, l'officier se laisse convaincre et demande à ses soldats de relâcher leur otage et de regagner les camions, ce qu'ils font en protestant vigoureusement de cette décision.

 Marcel mal à l'aise et peu rassuré ne rentre pas directement chez lui. Le village étant occupé par cette troupe, il craint la vengeance de certains allemands qui ont perdus un des leurs dans l'attaque. Il se cache et ce n'est qu'après le départ de la colonne qu'il retrouve discrètement la maison où Edmée son épouse se lamente pour lui, elle qui est enceinte de son premier enfant… Mon beau-frère Claude Vagnaux arrivera à bon terme et en bonne santé.

Mr Cotinaud a beaucoup menti dans sa déclaration à l'officier. S'il est exact qu'aucune personne du village n'est entrée au maquis de Pesmes, de nombreux jeunes sont en âge de combattre : Maurice Courboillet, Marc Voilly, Marcel Lambert, sans oublier tous les réfractaires nombreux employés dans les fermes. Il n'aurait pas fallu que le commandant allemand ordonne une fouille du village...

D'ailleurs aucun soldat n'en a pratiqué sur l'otage, Marcel était portant en possession d'un récépissé du maquis de Pesmes concernant l'emprunt d'une toile de faucheuse qui fut utilisée comme bâche pour abriter les maquisards...

Pour en finir avec cette attaque conjointe de 2 Corps Francs, une sérieuse engueulade a lieu entre les chefs de ces groupes concernant la fuite du premier groupe. L'affaire sera pourtant vite réglée, ces 2 corps francs se retrouvent en début de nuit, ensemble pour une nouvelle opération et toujours au même endroit... , opération qui ne pose aucun problème.

Dans ces 2 Corps Francs, on trouve en plus de Georges Thévenard et Roger Lafaille qui en sont aux commandes, Louis Bardy, Maurice Duvernoy, Henri Lombardet et son frère Pierre0

 

Crash d'un P-47 sur le territoire de la Résie St Martin

C'est encore ce jour, déciment le secteur est très emprunté, même par les avions alliés que vers les 3 heures de l'après-midi, un groupe de 4 avions américains P-47 Thunderbold occupent le ciel, l'un d'eux est en difficulté et cherche un endroit pour se poser. Il le fera dans un champ sur le territoire de Résie. Sa population va se mettre au service de son pilote blessé lors du crash, le jeune américain Arthur John Palmer. Son sauvetage et son retour 60 ans plus tard sur les lieux de son crash seront racontés dans un dossier spécial, mais toujours sur ce site.     Image(04) : Avion d’Arthur Palmer

 

Jeudi 7 septembre 44 les attaques de Chevigney et Sauvigney

Cette  journée du 7 septembre va devenir particulière pour le maquis de Pesmes : d'abord les harcèlements contre les convois allemands vont se dérouler sur la route de Pesmes à La Grande Résie, cible prioritaire de leurs Corps Francs. Puis leurs conséquences vont obliger le commandement du maquis à prendre des décisions indispensables pour sa survie.

--Dès les 10 heures, le Corps Franc de Georges Thévenard se poste sur la route de Gray, à hauteur du carrefour avec le chemin de Chevigney. Une vingtaine de cyclistes allemands dont certains ont la mitraillette fixée au guidon, se présentent  en vue des maquisards. Le mitraillage rapide et bref sème la panique dans le camp des cyclistes qui laisse trois soldats morts sur le terrain, leurs corps sont enterrés le soir même par Maurice Seguin et un villageois de Chevigney, le long du fossé à la lisière du bois. On compte un blessé dans les rangs des maquisards, un certain Boillot de Bonboillon (de la famille des teinturiers de Gray). Son état nécessite son transport à l'hôpital de Gray, Raymond Vorms le conduit avec la voiture du Dr Girardot, ce dernier lui retire la balle qu'il a reçue à l'épaule au milieu des Allemands présents, ces derniers ne savent pas que l'opération chirurgicale concerne un Terroriste en pleine mission. Leurs corps ne seront enterrés que dans la soirée tant le passage d'unité ennemies se montre important, par Maurice Bardy et d'autres de Chevigney, le long d'un fossé en bordure du bois.

--Mais en début d'après-midi, un important convoi ennemi est annoncé au camp par un guetteur de Sauvigney. De nombreux résistants sont déjà sortis, un rassemblement d'une dizaine d'hommes peut cependant être envoyé le long de cette route sous le commandement de l'adjudant Pierre Vautey. La colonne allemande composée en majeure partie de camions bâchés s'est arrêtée, à hauteur du château d'eau. Cet arrêt du convoi est-il une menace contre le camp ? Des quatre camions sortent des Allemands en armes qui investissent la route. Un coup de mitraillette (la Sten est très sensible voire capricieuse) lâché involontairement par un maquisard déclenche aussitôt des fusillades allemandes dans tous les sens auxquelles répliquent les résistants, mais plus celle du FM de Charles Melou qui s'enraye, obligeant Charles Gay, dont la musette remplie de grenades, son unique armement pour l'affrontement, à rejoindre le camp pour ramener des chargeurs au FM. Certains maquisards ne peuvent que demeurer immobiles, ils ne possèdent comme armement que des grenades et comment les lancer, allongés qu'ils sont dans le fossé, les branches en lisière des champs retombant jusqu'à 1 m du sol...

Les échanges de coups de feu durent bien vingt minutes avant que ne cessent les combats, les maquisards se replient dans le bois car il faut économiser les munitions, emmenant avec eux un blessé grave, un certain Boillot de Bonboillon. Les Allemands furieux de cette attaque décrochent, les camions repartent en marche arrière, emportant morts et blessés ; les soldats à pied quelque peu affolés qui accompagnent les camions, tirent dans tous les sens sur tout ce qui bouge, Mme Château institutrice à Sauvigney a bien failli y laisser la vie en refermant une fenêtre de l'habitation.

Ce retour des Allemands à Pesmes inquiète les maquisards. Pierre Vautey part en éclaireur constater les conséquences de l'altercation.

Le commandant de la colonne, furieux de cette attaque annonce au maire Bourgeois, de sanglantes représailles envers le village et sa population. --Nous connaissons le lieu où ils sont-- , précise le commandant, en sortant une carte et montrant du doigt le lieu du camp sur celle-ci.

Le maire assisté de membres de son conseil dont Mlle Julien, parlemente avec l'officier, les échanges s'adoucissent, quelques « compensations » lui sont aussi données. L'arrangement trouvé ne parle plus de tuer des otages ni de brûler le village, il suffit que le convoi reprenne la route en toute sérénité, le maire garantit qu'il ne sera plus attaqué.

 

Réactions allemandes

Cette agressivité allemande s'exprime à Pesmes par d'incessants déplacements de soldats armes en main, accompagnés de hurlements, de gestes déplacés envers les quelques Pesmois présents dans les rues. Elle fera trois morts au pays. Deux gendarmes Jean Marie Chollet et André Dubois intégrés au camp, inquiets pour leur famille, décident de se rendre en vélos à Pesmes. Arrivés près de la fontaine de Coulances, ils  croisent d'abord un side-car qu'ils ignorent ; mais se présente ensuite un véhicule léger allemand, une patrouille qui ratisse  le secteur, ils prennent peur et sautent de leurs vélos. Ils s'enfuient  en cherchant à gagner les landes plantées de peupliers ; les Allemands aussitôt sortent leurs armes et tirent en rafale contre les deux fuyards ; ils sont abattus moins de 100m plus loin.

Une stèle érigée en 1946 près du lieu de la tuerie rappelle leur massacre par ces fous furieux vengeurs.                                                       Image(05) : la stèle

Un civil de Pesmes André By est aussi arrêté dans Pesmes, mais par des éléments allemands de la Kriegsmarine. Ce dernier discute dans la rue Jean Jaurès avec quelques Pesmois dont Jean Jacques Amstutz quand s'arrête près de la maison du Dr Maussire une voiture bariolée et portant un camouflage, une 202. Ses occupants, des Allemands recherchent Mr By. Interpellé, il s'avance vers le véhicule, portant bottes et béret. On le prie de monter dans leur voiture, ce qu'il refuse énergiquement. Mr By est jeté dans la voiture sans ménagement comme Mr Amstutz qui essaye de s'interposer. Ce dernier fait comprendre aux Allemands qu'il est suisse, pays qui respecte une totale neutralité dans cette guerre, et que son arrestation susciterait des plaintes officielles de son gouvernement. Les Allemands n'insistent pas et le relâchent. La voiture repart emmenant Mr By, on ne retrouvera son corps que le lundi 11 septembre dans un terrain,  derrière un mur longeant les terrains de Mrs Thomas, leurs beaux-frères ; il fut tué d'une balle en pleine tête.

Sa mort ferait-elle partie des représailles promises par les officiers allemands, consécutives aux deux soldats tués lors de l'affrontement de l'après-midi à Sauvigney les Pesmes. Ce civil entretenait des liens particuliers avec les autorités allemandes locales, entre autres pour ses activités agricoles (il était le syndic cantonal), il aurait été tué par vengeance, le vent avait quelque peu tourné, ce dont les Allemands n'auraient pas supporté…

 

Des soucis à la Grande Résie

Le message du commandant allemand de la colonne, transmis par la mairie au camp est bien compris par les maquisards, qui laisse le convoi repartir sur Gray sans problème, mais avec une grande méfiance de la part de ces Allemands qui, 3 heures plus tôt étaient sérieusement malmenés. Pourtant le convoi s'arrête à La Grande Résie où Mr Clève, maréchal-ferrant va avoir la peur de sa vie. Des mitrailleuses sont postées aux entrées du village pour que personne n'entre ni ne sorte, la présence dans les rues de soldats allemands mitraillette au point, ne rassurent personne. Le maire et Mr Clavet le maréchal-ferrant sont convoqués. Malgré la crainte d'être fusillés, les 2 personnes se présentent néanmoins devant l'officier. Le motif est des plus ordinaires,  il faut remettre en état le radiateur percé d'un des camions et ceci immédiatement….

Tout cet étalage de forces pour un simple radiateur, montre bien l'état d'énervement et de craintes de cette colonne ennemie. Le village, après le départ des Allemands peut souffler et reprendre ses activités.

 Ainsi l'arrêt des camions allemands à Sauvigney dans l'après-midi n'avait qu'un seul but ; celui de remplir en eau le radiateur percé ...

 

Ces attaques répétées et repérées contre les convois allemands constituent une grave menace pour le maquis de Pesmes et sa survie. Pour éviter un nouveau Saligney, les responsables décident pour le lendemain 8 septembre, le transfert de tout le camp du Gros Bois en un autre lieu, camp de repli prévu par leurs chefs en cas de danger imminent : le camp de la Fontaine des Trois Bois entre Lieucourt et Vadans,

 

Vendredi 8 septembre 44, le changement de camp

Le déplacement du camp pose au moins deux problèmes aux responsables du camp. Le premier est la traversée de la route de Gray, voie très utilisée par les colonnes allemandes dans leur retraite vers la frontière ; le second est de taille, que faire de la centaine de prisonniers Bahnhof des chemins de fer allemand et de leur encadrement militaire, refilés au  maquis de Pesmes par celui de Perrigny sur l'Ognon ?.

 

Les prisonniers Banhof

C'est pratiquement une centaine de cheminots allemands ainsi qu'une vingtaine de soldats et  officiers allemands qui ont été faits prisonniers par  le groupe BDU3, le 3 septembre, dans des conditions plutôt rocambolesques. Ce maquis très actif sur l'axe Auxonne-Gray se trouve dans l'incapacité de gérer cet afflux considérable de prisonniers. Une demande faite au maquis de Pesmes pour les garder, a reçu un avis favorable du commandement de ce maquis, en espérant que la garde ne s'éternise pas.

En pleine nuit, deux tractions avant emmènent une dizaine de maquisards de Pesmes chercher le colis encombrant, certains comme Pierre Lombardet, à plat ventre sur les ailes, et ce jusqu'à Perrigny. Le retour se fait à pied, les prisonniers civils comme militaires sont liés entre eux pour éviter toute évasion, puis conduits au maquis de Pesmes. Les cheminots sont en uniforme bleu-marine, la casquette bleue arrondie devant et le pantalon rouge, mais beaucoup n'ont plus de chaussures : d'autres se sont-ils servis ? ou  les a-t-on déchaussés pour qu'ils ne sauvent pas…

Au camp, ils occupent une place très importante dans l'allée principale  qui part de l'étang jusqu'au bois.

 

Renvoi du colis à l'expéditeur

La traversée de la route de Pesmes à Gray est impensable tant celle-ci est empruntée et surtout par les troupes allemandes ; la seule solution est de les rendre à leurs anciens propriétaires ce qui est fait dans la soirée de vendredi.  Le transfert se fait sous la garde d'une douzaine de FFI armés, pour encadrer les prisonniers mis en file indienne, les pieds droit liés entre eux par des cordes. Lors de la traversée de la prairie inondée de Perrigny, juste après Broye, une gigantesque lueur rouge éclaire le ciel, il n'y a aucun doute, c'est dans le Jura tout proche, tout le monde pense à l'incendie d'un village; Allemands et Résistants se regardent, un gendarme accompagnateur a des idées de vengeance  mais rien ne se passe, le convoyage des prisonniers se poursuivit sans représailles. Ont participé à ce transfert Jean Simonot, Charles Gay qui en avait compté 140….

 On saura le lendemain que le village en feu  est Thervay. Suite aux attaques, dans l'après-midi, par des maquisards rassemblés à Orchamps, contre des éléments allemands isolés; 24 maisons brûlèrent, en majorité des fermes, avec le bétail spécialement rentré pour le mettre à l'abri d'éventuelles représailles allemandes…

Les convoyeurs de prisonniers couchèrent dans des fermes à Aubigney et rejoignirent directement le camp à Lieucourt, camp que Charles Gay connaissait à merveille, bien évidemment.

Au premier camp en début de soirée, les prisonniers allemands ainsi que des français arrêtés pour faits de collaboration sont conduits à leur nouvelle destination, par les champs, puis par les chemins et les bois, à pied bien entendu, et sous bonne escorte armée.

Le car des Mont-Jura réquisitionné par Jean Pellégrinelli sert au transport des biens du maquis: literie, nourriture et boissons ainsi qu'armes et munitions. Le voyage ne peut se faire que dans la soirée ; la traversée de la route de Gray très fréquentée par les colonnes allemandes pose moins de problème dès la tombée du jour.

Ne pouvant s'engager profondément dans le bois, le car est garé sur une ligne à 50 m du chemin menant du Tremblois à Lieucourt, un vrai danger. De nuit un véhicule mal éclairé empruntant ce chemin  risque de se trouver sur la ligne forestière où stationne le car…

De plus il n'y a rien pour accueillir les prisonniers allemands au camp, ils seront donc hébergés dans le car et y passeront au moins la nuit. Une dizaine de maquisards sont chargés de les surveiller. Bien qu'armés de mitraillettes, que peuvent-ils bien faire dans cet espace très restreint si d'aventure les prisonniers se rebellent ?

Pas d'actions prévues ce jour, il faut  s'occuper du camp, terminer les aménagements et traiter le cas des prisonniers enfermés dans le car des Monts-Jura : les parquer dans un enclos dans le camp afin qu'ils ne puissent pas s'en échapper.

 

Samedi 9 septembre 44

Transfert des deux pilotes américains

L'épisode de Sauvigney a bien alerté les responsables du maquis de Pesmes, le danger de représailles demeure pour tout le secteur. Il est décidé de rapatrier au camp les deux pilotes américains dont leurs avions se sont crashés dans la région, et tous deux réfugiés à Chevigney. Pas de problème avec William Mac Chesney dont l'avion a été abattu par la Flak tout près de la base de Dijon, logé chez Mr Simonot.                                     Image(06) : William Marc Chesney

En revanche pour Arthur Palmer hébergé chez Georges Thevenard, son avion est tombé près de La Résie St Martin et il n'est pas totalement rétabli, l'opération de son épaule n'ayant pu être réalisée dans de bonnes conditions.                          Image(07) : Arthur John Palmer

Leur transfert au camp se fait en deux temps. Les deux pilotes assistés Mireille Gaunel l'infirmière du maquis sont guidés jusqu'à Lieucourt par un jeune  maquisard de ce village, jusqu'à la maison de Jules Viennot oncle de Roger Vuillemot ? Une maison au fond d'une cour où les futurs occupants seront en sécurité (on verra qu'il en sera tout autre).                   Image(08) : La maison Lieucourt

Dimanche matin tous les quatre rejoignent le camp en suivant à travers bois, le chemin de Lieucourt au Tremblois.Au camp la situation s'améliore mais la nuit a été peu confortable, la plupart des maquisards ont dormi, couchés sous les arbres et le réveil est difficile. Aucune mission n'est programmée, il se dit que les Américains ne sont pas loin. Dole aurait même été libéré, les derniers Allemands ayant quitté la ville au matin.

 

Marius Dubor fait connaissance avec la maquis de Pesmes

Le camp est mis en alerte, un individu arrivé à Chevigney pose des questions à Jacques Simonot un enfant de 14 ans , en vacances à Chevigney

--Veux-tu me conduire chez le chef du maquis ? Le jeune lui répond qu'ils ne sont plus là.

 --Conduis-moi chez l'instituteur, ou chez le curé . --Il n'y a pas d'instituteur et le curé n'est pas de ce village. Devant le refus de l'enfant, l'homme essaye de se débrouiller lui-même, mais son manège tracasse un vieux de Chevigney, le père Morel qui fait prévenir le maquis.

A peine a-t-il quitté le village qu'il se voit appréhender par six hommes ; sans ménagement on le fouille puis on lui attache les mains dans le dos (avec les liens qu'il a dans sa poche), il est alors conduit à travers champs jusqu'au maquis, puis interrogé par Henri Moulin, le capitaine de gendarmerie de Gray.

L'interrogatoire dure, on pense que c'est un traître à la Résistance qu'ils détiennent. Lui persiste à affirmer qu'il est l'émissaire du commandant Roger venu présenter au Capitaine allemand de la place de Dole les conditions de reddition de ses hommes, sinon les 5000 maquisards qui encerclent Dole investiront la ville. Il précise que les Allemands ont quitté Dole, lui prisonnier dans le convoi et qu'ils l'ont relâché a l'entrée du village de Chaumercene, suite à l'attaque aérienne de P47 contre leur convoi. Une histoire qui ne tient pas debout…

Pourtant la véracité de ses propos se manifeste à l annonce d'un fait plutôt banal : il joue au football au FC Dole. Un des membres du tribunal du maquis aussi footballeur mais à Pesmes le reconnaît;  Marius Dubor, puisqu'il s'agit de lui, est libre dans le camp, sous la garde d'un homme armé. Ses liens lui sont retirés, c'est avec ces mêmes liens que les Allemands lui ont attachés les mains dans le convoi, liens qu'il avait voulu gardés en souvenir de ces jours très particuliers…

 

Dimanche 10 septembre 44

La journée commence par un petit déjeuner amélioré, les dames et demoiselles de Lieucourt ont fait des gaufres spécialement offertes aux maquisards, puis réunion solennelle de tous ses hommes, Le capitaine Moulin demande de causer à mi-voix, l'ennemi est là tout proche, à quelques deux cents mètres de la route de Lieucourt au Tremblois. Il décide qu'aucune sortie de maquisards n'est autorisée : black-out dans le camp.

A 10 heures et demie, une messe basse est célébrée par l'abbé Jules Jeannin, avec beaucoup de ferveur, en plein milieu des bois, elle revêt un caractère exceptionnel pour chacun des participants. Un grand moment de recueillement, de foi et de communion, dans ce contexte si particulier.

En milieu d'après-midi la situation évolue rapidement, des nouvelles venues de Pesmes annonce que le pont de Pesmes a sauté dans la nuit mais sans faire trop de dégâts et que les Allemands se sont regroupés pour partir sur Gray. On précise même qu'une jeep américaine a réussi à passer le pont mais les blindés qui l'accompagnaient ont fait demi-tour, et sont repartis sur Le Belmontot (colline au-dessus de Mutigney faisant face à Pesmes).

Vers les 17 heures, le capitaine Moulin ordonne une sortie du camp, une section se rend en camions à Pesmes afin d'établir le contact avec les premiers éléments américains, il est dix heures quand remontent de la Grand Rue deux véhicules avec l'étoile sur le flanc : une jeep et un half-track américains.